Entre bons souvenirs et futur incertain... [PV Elya G]

La jeune apprentie Envoleuse sourit doucement, et froisse le papier entre ses mains. Derrière son épaule, elle sent le regard de Fried qui tente de lire ce qu’il y avait écrit. Elle ne sait pas s’il a réussi à le faire, mais dans tous les cas, elle s’en fiche : elle va pouvoir revoir Nana ! Depuis combien de temps ne l’avait-elle plus croisée ? Depuis qu’elle était partie de chez elle pour intégrer le Domaine en tant qu’apprentie Envoleuse.
Ca faisait trois ans.

La joie traversa la jeune femme, qui se retint de justesse de faire quelques pas de danse. Pas devant le Mentaï. Mais malgré elle, un immense sourire étirait ses lèvres, découvrant même ses dents, et à vrai dire… Pourquoi lutter contre la bonne humeur ? Cela faisait tellement de bien !

- Kaünis ? Qui est-ce ?

Serait-ce de la jalousie qu’elle percevait dans son regard, et de l’agacement dans sa voix ? Cela aussi, la met en joie. Ca veut dire que ce qu’elle appelait charme semblait opérer sur le jeune Mentaï. A croire que tout pouvait bien se passer, des fois… Même si sa dernière rencontre avec ces deux hommes bizarres – un Envoleur et un rien du tout – l’avait un peu agacé, ce sentiment venait tout simplement de s’évanouir.
Il n’y avait plus que de la gaieté dans son esprit.

- Une vieille amie. Tu ne connais pas.

Devant l’air dubitatif de Fried, Kaünis consentit à lui donner son morceau de papier froissé. Dix jours de l’autre côté de Chen… Il valait mieux qu’elle partît aussitôt, en fait ! C’était à peine le temps nécessaire pour rallier le Pollimage d’Al-Far. Tournant son visage vers celui du Mentaï, qui redressait à peine le menton de sa lecture, elle lui adressa un petit sourire.

- J’y vais. Et je dois partir maintenant. Tu vas faire quoi ?

Fried prit le temps de réfléchir avant d’annoncer, d’une voix un peu déçue :

- Je vais rentrer. Je t’attendrai au Domaine.

Hochant la tête, Kaünis allai faire demi-tour quand le jeune homme s’approcha d’elle d’un mouvement légèrement hésitant. Ah… Il fallait vraiment se dire aurevoir ? Un soupir franchit les lèvres de Kaünis, mais elle se laissa faire, et l’homme se pencha légèrement pour poser ses lèvres sur les siennes. Un léger frisson remonta le long de l’échine de l’Envoleuse, mais elle ne bougea pas, et lui adressa un nouveau sourire.

- Ca me va.

* * *

Kaünis était descendue de Fureur pour s’approcher de l’embranchement qu’avait désigné Nana dans sa lettre. Il y avait un petit village qui bordait cet endroit si particulier entre Chen et le Pollimage, et elle posa donc sa monture dans les écuries, avant d’avancer le nez en l’air dans les pseudos-ruelles, cherchant un indice pour retrouver celle qu’elle considérait comme sa meilleure amie.

Se dirigeant vers l’embranchement à proprement parler, elle passa sur un ponton, puis sur un second. Chen s’étendait de toute sa majesté sous le soleil, et pourtant de son calme plat naissait le puissant Pollimage. Le fleuve, loin d’être indolent, faisait des remous déjà impressionnants à quelques mètres de la délimitation, et son grondement assourdissait légèrement.
Ce fut peut-être pour cela que Kaünis n’entendit pas les quelques pas dans son dos, avant qu’une masse ne lui tombât dessus. Dans un réflexe rodé son apprentissage, la jeune femme se tourna, attrapa un poignet, le fit tourner, avant de se retrouver dans le dos de son assaillant, ses lèvres tout près de son oreille pour lui murmurer des mena…

- Kaünis ?

Cette voix !
Kaünis cligna plusieurs fois des paupières pour se rendre compte que c’était bien Nana qu’elle venait de coincer ainsi. Aussi promptement qu’elle l’avait attrapée, elle la relâcha, et cette dernière se tourna vers elle, lui tirant un immense sourire.

- Nana ! Tu m’as fait peur, bécasse va.

- J’ai vu ça ! T’as failli m’arracher le bras !

- Désolée…

- T’inquiète, j’ai déjà oublié. On va manger un bout ?

Acquiesçant de la tête, Kaünis se plaça à côté de Nana pour la suivre. Cette dernière l’emmena à l’auberge du village – cela devait être la seule, vu la taille du patelin – et elles s’installèrent à une table sur le côté de la salle.

- Alors, ils n’ont pas voulu de toi ?

- Mmm… Oh m’en parle pas ! J’étais dégoutée… Mais en fait….

Léna lui raconta donc ce qu’il s’était passé, comment on lui avait dit qu’elle n’avait pas les compétences pour entrer dans la Légion Noire. Et comment, quelques heures plus tard, alors qu’elle s’en allait avec ses affaires, on l’avait rattrapée pour lui proposer un poste auprès de l’Empereur : Espionne, rien que ça !
Au service de l’Empereur…

A mesure qu’elle parlait, Kaünis était à la fois très heureuse pour son amie, mais aussi mal à l’aise par rapport à ses propres projets à elle. Un jour ou l’autre, elle devrait s’opposer à Nana, et cette perspective ne lui plaisait pas des masses, il fallait bien l’avouer.

- Et toi ? Tu as l’air d’avoir appris des tonnes de trucs de fous, avec ce que tu m’as fait !

Un demi-sourire passa sur les lèvres de Kaünis. Mais avant qu’elle ne répondît, la porte de l’auberge s’ouvrit et son attention fut happée par le nouveau – ou la nouvelle venue…

- Je m'en vais Regan.

Un éclat de regret et même de douleur était passé dans son regard mais il n'avait jamais été très expansif, cette lueur passa donc furtivement.

- Tu vas me manquer belette.

Je savais que je n'aurai rien de plus si ce n'est ce regard plein d'amour. C'était comme ça entre Regan et moi. Pas besoin de mots, nous nous étions toujours tout de suite compris. Lui aussi il allait me manquer. Avant de me faire rattraper par mes émotions, j'attrapais mon sac avec mes maigres possessions, je déposai un baiser sur la joue de Regan et sortit, sans un regard en arrière.

Maintenant, ma nouvelle vie pouvait commencer. Sans me retourner, j'avais quitter Al-Jeit de nuit, passant une dernière fois par la magnifique porte d'Améthyste.


La route avait été longue depuis que j'avais quitté Regan. Très longue. J'avais souvent peu dormi, parfois très bien dans des auberges. Regan m'avait laissé une somme d'argent très conséquente et j'avais tenu à l'économiser au maximum. Mais personne ne m'attendais à l'Académie, du moins pas encore alors je décidais de passer une nuit dans un petit village au bord du lac Chen. J'avais entendu dire que c'était agréable et paisible.

En arrivant dans le petit village, je fus une fois de plus étonnée par le fait que de si petits villages pouvaient exister. Je n'étais jamais sortie d'Al-Jeit et ces villages qui avaient pourtant été nombreux sur ma route m'avaient étonnés.

Il y avait un petit bois autour et comme il était encore tôt, je m'approchai d'un arbre, l'escaladais de quelques gestes rapides et précis et me posai sur un embranchement pour regarder les eaux paisibles du lac Chen. Qu'allait me réserver mon apprentissage de Marchombre une fois arrivée à l'Académie ? Cela comblerait-il ce manque que je ressentais ? J'avais hâte de savoir.

J'attendis qu'arrive le crépuscule pour descendre de mon arbre et je me dirigeai vers le centre du village pour trouver un endroit où manger. Je trouvais rapidement ce qui semblait être la seule auberge du village, toutefois, elle semblait très accueillante, je m'y engouffrais alors sans hésiter. Je m'arrêtais sur le pas de porte et scrutai la salle. La lumière était tamisée et la tenancière était derrière son comptoir. Elle me jeta un coup d'oeil et se détendit en m'apercevant. Je devais passer pour une gamine à ses yeux et seule en plus, je ne présentais pas de danger.

Mais je me retournais en sentant un regard insistant posé sur moi. Je découvris une jeune femme, sans doute guère plus âgée que moi avec des cheveux noirs d'encre et un regard scrutateur. Elle dégageait... quelque chose que je ne pouvais pas décrire mais elle m'apparue un brin inquiétant.

Je haussai les épaules et sans plus m'intéresser à elle je m'approchai du comptoir pour commander à manger et réserver une chambre.

Le regard noir de Kaünis s’attarda quelques secondes sur la silhouette qui entrait dans l’auberge. C’était une jeune fille qui devait avoir un an ou deux de moins qu’elle, dont les cheveux noirs ondulaient dans son dos. Elle capta une seconde son regard – étrange amalgame entre l’ambré et le vert – et finit par détourner le sien, pour reporter son attention sur Nana.

- Euh…

Le temps de retrouver le fil de la conversation, l’apprentie Envoleuse cligna plusieurs fois des paupières. Pour ne rien arranger, on vint leur servir leur commande, et donc Kaünis n’allait pas s’amuser à étendre sa vie privée devant une personne totalement inconnue. Déjà qu’avec des gens qu’elle connaissait, comme Nana, c’était difficile pour elle, alors après…

- Oui, j’ai réussi à rallier l’endroit que je cherchais, et j’ai été prise en apprentissage. Bah maintenant, ça doit faire presque trois ans en fait, que j’y suis. Mon… Elle fit une petite pause pour jeter un coup d’œil autour d’elle, et continua dans un murmure. Mon Maître a mis du temps avant d’accepter que je serai sa seule apprentie… Inutile de préciser pourquoi elle était la seule apprentie, ni pourquoi elle avait finalement été la seule à continuer – à cause de Gil, évidemment.Enfin, ça fait presque un an que tout est à peu près en ordre et que j’avance vraiment bien, je suis contente.

Un sourire éclaira le visage de Léna, et elle hocha la tête : si Kaünis était contente, elle l’était elle aussi. Elle avait l’habitude que sa meilleure amie ne se livre pas, et savait pertinemment qu’elle n’aimait pas exposer sa vie si elle ne trouvait pas cela très intéressant pour son interlocuteur – ou dans un but bien défini. Et surtout, elle avait parfaitement conscience que si Kaünis passait si rapidement sur ces trois années, c’était qu’elle était tenue au silence.
Ce furent les raisons pour lesquelles elle n’insista pas.

- Au fait ! J’ai rencontré quelqu’un…

Kaünis haussa les sourcils : Nana, rencontrer quelqu’un ? Dit comme ça, cela la surprenait évidemment : d’après son discours, elle avait été prise sept jours sur sept, une grande majorité de la journée à chaque fois, et elle ne voyait pas trop comment elle aurait pu faire des rencontres, d’autant qu’ils devaient tous être concentrés pour réussir à passer les tests de compétence… non ?

- Non, mais ça ne fait que deux semaines, en fait…

- Je me disais aussi !

- Roh ça va hein ! Il s’appelle Foren, et c’est un garçon…tellement... Enfin, il est gentil, drôle… C’est un voyageur, je l’ai rencontré alors qu’une caravane arrivait dans Al-Jeit. Je n’arrête pas d’y penser… Après, je ne sais pas, moi j’ai eu un truc, mais peut-être pas lui.

Un sourire en coin était apparu sur les lèvres de Kaünis, alors que les pommettes de Nana viraient au rouge soutenu. Eclatant de rire devant la mine mal à l’aise de son amie, l’apprentie se pencha légèrement vers elle.

- Je vais te dire un secret… moi aussi !

- Quoi ?!

Nana avait littéralement crié le “quoi”, qui résonna dans toute la salle. Gênée, Kaünis baissa la tête, pour se cacher derrière ses longs cheveux, et attendit que les conversations reprennent… Mais un bruit, dans son dos, attira son attention, et vu la tête de Léna, elle n’avait pas rêvé.

- Bonjour mesdemoiselles… je peux vous proposer un verre ?

Le regard de Kaünis se leva vers le visage de l’homme, et elle le détailla sans ciller pendant quelques secondes. Il devait avoir une trentaine d’années, mal rasé, et surtout son haleine empestait l’alcool. Fronçant le nez, la jeune femme se mordit l’intérieur de la joue : elle n’allait pas être très agréable si elle commençait à parler.

- Non merci, nous avons tout ce qu’il faut comme vous le voyez ! Mais je suis sûre que la jeune fille là-bas, celle qui est seule, sera intéressée par votre proposition…

Fronçant un sourcil, Kaünis lança un regard étonné à Nana, dont un léger sourire étirait les lèvres. Elle semblait assez confiante, et cela permit à l’homme de la prendre assez en considération pour regarder la jeune fille en question – celle qui venait d’entrer, en fait.

- Vous avez raison. Je vais de ce pas lui offrir le divertissement de ma compagnie.

Retenant un rire, Kaünis et Nana suivirent l’homme du regard – le plus discrètement possible pour Kaünis, mais il semblait que Nana, en dépit de son prochain statut d’espionne, ne soit pas vraiment discrète pour ce genre d’affaires. L’homme s’avança donc vers le comptoir où se trouvait la fille, et lui adressa un sourire. Elles purent même entendre le début de leur conversation.

- Bonjour mademoiselle, je peux vous proposer un verre ?

Celui-là ne semblait pas avoir trop d’agressivité, mais on ne sait jamais ce qui se passe dans la tête des ivrognes….

- Bonjour mesdemoiselles… je peux vous proposer un verre ?

J'avais entendu la voix forte de l'homme ivre de là où je me trouvais alors que je me trouvais éloignée de plusieurs mètres. Toutefois, je n'entendis pas la réponse que la jeune fille qui fit sourire son amie. Cette dernière me procurait une étrange sensation. Pourquoi cette impression si prenante ? J'avais l'impression qu'elle me ressemblait un peu mais en m'étant en même temps singulièrement opposée. D'où me venait cette étrange impression ? Une fois de plus, je haussai les épaules. Bientôt, je commencerai cet apprentissage que d'une certaine façon, j'avais déjà commencé seule il y a bien longtemps...

- Vous avez raison. Je vais de ce pas lui offrir le divertissement de ma compagnie.

Là, j'avais un mauvais pressentiment. Sans même me retourner, j'entendis le pas lourd et pesant se rapprocher de moi. Non que cela m'effrayait mais moi qui espérait passer une soirée tranquille, cela me contrariait fortement.
Pendant les années d'errances dans les rues et les quartiers les plus mal famés d'Al-Jeit. J'avais une prédilection pour l'escalade des plus hautes tours de Jade la nuit mais en quittant ces quartiers riches, il fallait retraverser les pires ruelles pour rentrer. Cette ambiance stressante et angoissante qui avait effrayée nombre de jeunes enfants du quartiers m'avait plutôt forgé un caractère. Malgré le fait que je sois assez grande, ma souplesse m'avait souvent permis de me tirer de situation compliquée.

- Bonjour mademoiselle, je peux vous proposer un verre ?


Heureusement, il ne semblait pas agressif. Son regard ne semblait pas avide. En fait, il semblait simplement qu'il avait besoin de compagnie. Toutefois, je décidais de mettre les choses au clair dès maintenant.

- Je n'ai rien contre un verre, mais je me limiterais à ça. Un verre.

Il parut peut être un peu déçue mais après tout, il n'avait manifesté aucun signe de violence malgré sa légère ivresse. Un sourire remplaça assez vite cette mine déçue.

- Avec plaisir jeune demoiselle.

Il prit un tabouret et s'installa.


- Et qu'est ce qu'une jeune fille comme toi fais dans une auberge comme celle-ci ? s'enquit-il après que la tenancière nous ait servis.

J'esquissai un sourire et décidai déluder.

- Une affaire m'a appelée dans la région. Je risque de passer pas mal de temps autour du lac Chen ces prochains mois.

- Alors nous pourrons sûrement nous recroiser, demanda-t-il avec espoir.

- Je crains d'être très occupée et de ne pas avoir de temps du tout à consacrer à autre chose qu'à... ce qui m'appelle.

Entre temps, j'avais fini mon verre et je me levai, marquant la fin de ce partage. Je jetai un coup d'oeil vers la table des filles qui m'avaient gentiment envoyé l'homme. L'étrange fille aux yeux vert sombre me fixait avec une expression plus qu'étonnante...

A la grande surprise des deux comparses, la jeune fille en question sembla accepter la proposition de l’ivrogne, et Kaünis eut un petit sourire en coin. Décidément, Nana avait le chic pour ce genre de situation ! Quand elle était seule, elle ne se faisait presque jamais aborder.

Elle ne se faisait jamais aborder, avant.
Avant d’avoir changé sa garde-robe pour plus plaire à Fried. Il faut croire que le Mentaï avait les goûts « habituels » des hommes en général. Avec son corset mettant en valeur sa taille de guêpe et ses seins, ainsi que son pantalon assez gainant, elle sentait beaucoup plus les regards sur elle que jusqu’alors.
Les hommes aiment les petites midinettes, alors ?

Un léger soupir franchit les lèvres de la jeune femme, tandis que Nana riait toute seule en fixant l’ivrogne et la jeune femme qu’il avait finie par aborder. Secouant la tête de droite à gauche, faisant voleter ses cheveux dans son dos, Kaünis lui lança :

- Et ça t’amuse… Elle est contente.

- Oui ! Je suis contente. C’est mignon, regarde…

Un soupir de résignation passa sur les lèvres de Kaünis, tandis qu’elle se tournait lentement pour voir le "spectacle". L’homme ivre ne semblait pas méchant, peut-être un peu déçu, et semblait vraiment intéressé par la jeune fille. Après tout, peut-être qu’il avait juste besoin de compagnie, mais l’apprentie Envoleuse n’était pas du genre à prendre les gens en pitié. S’il en était arrivé là, c’était sa faute, et il n’avait qu’à se prendre en main.
En arrêtant de boire, déjà.
L’haleine qui pue le chacal, ça va bien cinq minutes, mais après ça donne des nausées.

- Oh, elle s’en va. Attends, je vais l’appeler.

Perdue dans ses pensées, Kaünis mit quelques secondes à comprendre ce que venait de dire son amie, et quand elle ouvrit la bouche pour protester, c’était trop tard.

- Hey !

La Mercenaire poussa un soupir, et prit sa fourchette pour prendre une bouchée de son plat, faisant comme si de rien n’était. Peut-être que si elle ne levait pas la tête, l’autre ne ferait pas attention à elle.
Nana avait vraiment la parole beaucoup trop facile. Le contact trop chaleureux, avec les gens. En somme, elle était ultra-sociable, tout l’inverse de Kaünis, l’asociale de service. Mais c’était aussi sans doute pour cela qu’elle l’appréciait tant.

- Il a l’air gentil, et intéressé ! J’espère que tu donneras suite !

Léna lança un clin d’œil à la fille, en conclusion, et le sourire qu’elle lui lança était sincère. Oui, Nana était sans doute une grande rêveuse, mais Kaünis était certaine que son futur métier d’espionne lui donnerait une vision bien plus sombre du monde en général. Mais elle n’avait pas envie de prendre la responsabilité de la perte d’innocence de son amie.

La jeune fille semblait réellement heureuse de voir que celle qui était accoudée au bar n’avait pas repoussé l’ivrogne. L’Envoleuse n’était pas dans sa tête, mais elle était presque certaine que cette dernière pensait que c’était un joli début de romance…

- Nana, tu ne devrais pas trop insister..

Elle ne connaissait pas cette fille, après tout. Autant, c’était une guerrière susceptible, même si son attitude avec l’homme pouvait indiquer que non. Enfin, il n’y avait plus qu’à voir, après tout…

- Hey ! Il a l’air gentil, et intéressé ! J’espère que tu donneras suite !

Je me retournais vivement vers la personne qui m'interpellait et je me rendis compte que c'était la fille qui accompagnait celle qui m'intriguait... Étrange. Toutefois, elle me lança ensuite un clin d'oeil qui prouvait qu'elle semblait sincère et excitée à l'idée qu'elle ait pu provoquée un début de... quelque chose qu'elle prenait pour une romance.

Une sourire étira le coin de mes lèvres et je baissai la tête. Sa comparse avait la tête baissée elle aussi comme si elle fuyait mon regard. Étouffant un rire je lançai :

- Merci pour cette... subtile rencontre.

Je faisais bien évidemment référence au fait que les deux jeunes femmes m'avaient "envoyées" l'ivrogne pour qu'il ne les importune pas et je sentais que cette idée avait réjouis la fille sombre aux cheveux noirs. Peut être avait-elle espéré que j'aurai des difficultés à m'en sortir.

Elle releva la tête et croisa mon regard. Je lui lançai un regard de défi avant de sortir fièrement de l'auberge. Je voulais faire un tour avant d'aller me coucher. J'aurai bien le temps de rejoindre la petite chambre réservée auprès de la tenancière.

Une fois dehors, je respirai l'air frais du soir qui me chatouilla les poumons. Le vent semblait joueur et s'amusait avec les cheveux qui volaient derrière moi. Je pris une grande inspiration et je partit en courant.Pour aller où ? Peu importait. Pourquoi ? J'avais besoin de me dépenser physiquement. Je courrais pendant dix minutes environ quand je me souvins du lac que j'avais observé plus tôt dans la matinée. Un franc sourire étira mes lèvres et j'en pris la direction.

Arrivée à son bord, je ne pris même pas le temps de me déshabiller, je me servi de mon élan pour faire un plongeon majestueux dans les eaux glacées de la soirée.

Un éclat de douleur traversa mon corps sous l'effet du froid puis je fus satisfaite de découvrir que j'étais complètement lucide. Je n'avais plus les idées embrumées par le verre que j'avais pris à la taverne et l'effet de chaleur étouffante qui régnait dans les lieux s'était dissipé de ma peau.

Pourtant, alors que la sérénité me revenait je repensais à la fille aux cheveux. Elle était belle, il fallait bien l'avouer. Même très belle. Toutefois son regard étonnant dégageait quelque chose de différent. Quelque chose semblait dur en elle. A cet instant, je compris qu'en fait, je mourrai de curiosité. Je voulais parler avec elle.

Pour l'heure, je sortis de l'eau froide, ce bain improvisé avait été des plus vivifiant et utiles. Je me baisser pour ramasser un couteau que j'avais jeté sur la berge avant de plonger et pris le chemin du retour. Serait-elle encore dans l'auberge quand j'arriverai ? Sinon, je devrais faire une croix dessus. Je reprendrai le chemin de l'Académie le lendemain.

- A nous deux... murmurai à la nuit.

Seul le silence me répondit.

Oui, cette fille était bizarre.
Kaünis avait bien noté le regard de défi qu’elle lui avait envoyé – sans raison, en plus – et le fait qu’elle fût sortie de l’auberge avec le menton relevé, tête haute, montrait peut-être le peu d’estime qu’elle avait pour les autres. Haussant les épaules, la jeune femme devait bien avouer que cela ne la chiffonnait pas plus que cela : après tout, elle était avec Nana, et cela lui suffisait pour l’instant.

- Elle a l’air gentille !

Un petit ricanement franchit les lèvres de la jeune femme, malgré elle.

- Quoi ?

- Je la trouve bizarre, moi. Mais après, je sais que tu as des goûts étonnants, toi aussi !

- T’es juste moqueuse !

Partant dans un éclat de rire, les deux jeunes femmes tournèrent la tête vers leur assiette, pour enfin commencer à manger tranquillement.




Et voilà. Nana était partie, et Kaünis était un peu triste, en fait.
Elle avait passé un très bon moment avec son amie, et aurait aimé que cela durât plus longtemps. Pourtant, toutes les bonnes choses ont une fin, même si Léna devait juste rejoindre l’homme qui lui faisait tourner la tête ! Foren… L’apprentie envoleuse aurait aimé le rencontrer, mais elle imaginait désormais sans mal ce qui allait se passer quand les deux tourtereaux allaient se retrouver, et ne voulait pas être l’objet d’un sentiment de gêne.

Allongée dans son lit, elle n’arrivait pas à trouver le sommeil.
Son regard foncé traînait sur les planches du plafond, et ses pensées ne cessaient de voguer.

Tantôt, Fried était là, tout près, et elle parvenait à le rendre complètement accro à elle. Littéralement. Elle se sentait alors frémir de bonheur, en sachant où elle pourrait aller avec un Mentaï comme compagnon. Dominer cet Empire qui avait bien besoin d’être reconstruit selon de nouvelles règles : trop de choses étaient déséquilibrées en Gwendalavir. Et puis, régner, c’était toujours tellement alléchant…

Pourtant, parfois, l’image de Yan venait perturber ce futur qui l’enchantait.
Il fallait bien avouer que ce jeune homme l’avait atteinte bien plus profondément qu’elle n’aurait bien voulu l’admettre. Hors de question de s’abaisser à lui montrer qu’il l’avait touchée. Hors de question de lui laisser croire qu’il n’avait ne serait-ce qu’une seule chance avec elle.

Rejetant brusquement le drap, Kaünis se leva sans ambages. Ses pieds nus se posèrent sur le parquet froid, et elle se redressa pour sortir de sa chambre : elle avait besoin d’air. La pièce avait beau être chaleureuse et accueillante, cela n’était pas assez, et elle avait envie de sentir le vent dans ses cheveux, ainsi que de voir le firmament. Enroulant une simple cape autour de ses épaules, elle sortit donc du couloir de chambres, et poussa la porte de l’auberge. S’éloignant d’un pas décidé, elle capta une silhouette qui s’avançait, elle, vers l’auberge.

C’était la fille à l’ivrogne.
Haussant les épaules, Kaünis s’assit le long d’un tronc d’arbre, et leva la tête vers les étoiles. Du coin de l’œil, elle observait le trajet de la fille, se demandant ce qu’elle faisait dehors à cette heure-ci.

Elle aussi n’arrivait pas à dormir ?

Je marchai pour retourner à l'auberge. Mes vêtements étaient mouillés, mes longs cheveux aussi. Je n'allais pas tarder à tomber malade si je ne me mettais pas au chaud rapidement. Je montai dans la petite chambre que j'avais réservée et essorai mes cheveux. Ils restaient humides mais cela irait bien comme ça. Je me changeait aussi et enfilai une tenue toute en cuir que j'avais achetée avec quelques pièces de la lourde bourse que Regan m'avait donné.

Regan... Je m'égarai quelques instants dans des souvenirs. Puis je secouai la tête et me repris. Il ne fallait pas que je pense à lui maintenant sans quoi je serai capable de faire demi tour et retourner à Al-Jeit.

Je m'allongeai quelques instants. Et me rendit compte que je serait incapable de dormir. J'ouvris alors la fenêtre et descendit doucement le long de la parois. Je ne savais pas pourquoi j'avais besoin d'être autant dehors mais l'ambiance étriquée de la chambre m'oppressait.

J'atterris souplement sur le sol et commençai à marcher, sans vraiment de but. Puis un bref mouvement me fit tourner le regard. La fille au cheveux noirs était là, sur une souche. Seule. Son amie avait dû la quitter.

Je fit encore quelques pas dans la direction que j'avais prise avant de m'arrêter et de me diriger vers elle. Plus je m'avançai plus j'hésitai et je ralentissais. Toutefois, je ne pouvais m'empêcher de continuer. Arrivée à sa hauteur, j'allais enfin en avoir le cœur net.

- Je te dérange ?

- Je te dérange ?

Kaünis haussa un sourcil. Parce que si c’était le cas, c’était différent peut-être ?
Elle n’avait pas vu la fille sortir par la porte d’entrée de l’auberge, donc cette dernière était sortie d’une autre manière. Par la porte de service ? Par une fenêtre ? En fait, l’apprentie s’en fichait royalement, mais il fallait croire que le fait d’avoir vu Nana l’avait radoucie pour un temps.
Elle espérait juste que cela ne durerait pas trop longtemps.

- Non.

Haussant les épaules, Kaünis laissa son regard se perdre dans le lointain quelques secondes. Ses pensées tourbillonnaient sans cesse, et deux personnages en étaient la cause. Elle en avait marre de se prendre la tête avec eux, et en même temps elle était incapable de penser à autre chose. Il fallait vraiment qu’elle reprît les cours, et qu’elle parte avec Gil, cela lui changerait les idées, et elle n’aurait pas le temps d’y penser.

Relevant les yeux vers la jeune fille qui se tenait non loin d’elle, Kaünis prit une inspiration tout en la détaillant sans gêne. Elle semblait plus grande qu’elle, et sa morphologie n’était pas de celles qui n’ont que la peau sur les os – des cadavres ambulants, ces filles-là – elle possédait également de longs cheveux noirs, et son regard, changeant, était rempli de curiosité autant que de méfiance.
Un petit sourire étira les lèvres de l’Envoleuse, alors qu’elle se redressait légèrement.

- Toi non plus tu n’arrives pas à dormir ? Il est pas revenu, l’ivrogne ?

Ivrogne était sans doute un peu fort comme mot, mais Kaünis s’en fichait comme d’une guigne. Il était alcoolisé, et comme il n’avait pas tout sa tête, il était même ivre. De là à dire qu’il était un ivrogne, il n’y avait qu’un pas, qu’elle n’hésitait pas à franchir. Elle ne raffolait pas de l’alcool elle-même, et partait du principe que lorsque l’on aimait cela, on y tombait dedans très rapidement en peinant toujours pour s’en sortir. La dépendance commençait très vite, et prenait rapidement des couleurs de vérité et de quotidien…

La jeune fille n’avait pas spécialement envie de bavarder – elle l’avait fait largement plus que de coutume avec Nana, d’ailleurs – et aurait bien gardé le silence. Mais voilà, quelque chose la poussait à parler, elle ne savait pas trop quoi. Peut-être justement toutes ces pensées qui s’entrechoquaient sous son crâne ? Parler permettait de passer derrière, et donc de les ignorer plus ou moins, en tout cas de réussir à ne pas se focaliser dessus. Elle n’en avait pas plus parlé que cela à Nana, car même si la jeune fille était sa confidence, elle ne pouvait pas décemment lui parler des fonctions des deux jeunes hommes et pourquoi elle tenait tant à Fried. Elle lui avait dit qu’il y avait quelqu’un dans sa vie, oui, mais s’en était tenue là…

Lâchant un soupir de lassitude, Kaünis redressa légèrement la tête et allongea son dos contre le tronc derrière elle. Fermant les paupières quelques secondes, elle se demanda ce qu’avait cette fille, et pourquoi elle était dehors. Elle ne semblait pas très bavarde elle non plus, et cela n’était pas sans lui déplaire. Elle aimait le silence.
Mais elle préférait le silence quand son esprit était en paix !

- Non.

Mais elle ne semblait pas ravie non plus. Peu importait. Cette fille avait quelque chose et j'avais plus ou moins besoin de solitude ce soir là mais cette fille ne semblait pas de celles qui jacassent sans arrêt.

Elle me dévisageait totalement et presque éhontément mais venant d'elle, cela ne me gênait pas trop. Je me contentai de hausser les épaules. Après tout, moi aussi je l'avais détaillée pendant notre moment commun dans la taverne.

Je m'allongeai dans l'arbre près d'elle. Le contact de l'herbe très fraîche dans mes cheveux humides me procurèrent de légers frissons accompagnés de chair de poule.

- Toi non plus tu n’arrives pas à dormir ? Il est pas revenu, l’ivrogne ?

Elle semblait lasse. A tel point que cela me percuta. Comment pouvait-on être aussi lasse à un âge aussi jeune que le sien ? La vie n'était pas toujours tendre mais à ce point...

Je fermai les yeux. J'aurai aimé parfois être un nuage pour m'évader de ce monde si triste si violent... J'espérais sincèrement que ma future formation de marchombre m'aiderait à y voir plus clair et peut être, qui sait, à réviser mon jugement.

Pour l'instant, le regard tourné vers les étoiles, je ne me rappelais que de cette simple activité que nous faisons avec Regan. Nous ne partagions pas grand chose ensemble si ce n'était ses revenus et son toit sauf cet instant qui était bien trop rare. Nous aimions partagé cet instant. Comme toujours, nous ne parlions pas. Mais parfois il ne prenait la main pour me montrer qu'il était là. Il savait toujours quand ça n'allait pas et agissait toujours en conséquence.

Je n'avais guère envie de parler mais je préférais encore ça que de devoir repenser à tous ces souvenirs du passé qui me saisissaient. Mon enfance de vagabonde me rattrapait et j'en venais même à me demander si l'avenir que je me préparais était vraiment celui dont j'avais besoin...

- Il était le dernier de mes soucis. Une façon de m'en éloigner, je dirais même. Quant au sommeil, il est aux abonnés absents. Quand le passé nous tient...

Je crois les mains sur mon ventre et je fermai les yeux à nouveau. J'étais à la fois excitée, triste et angoissée. Je ne savais même pas qu'un tel panaché d'émotions était possible en même temps. Mais après tout, il y avait tellement de choses que je ne savais pas...

- Et toi ? Ton ami est partie ?

Je gardais le silence quelques temps. La nuit était belle et dégagée mais fraîche. Une légère brise soufflait me faisant frissonner. Je me relevai tout à coup.

- Tu viens, on bouge ?

- Pourquoi faire ?Je suis bien là.








[ Attention, c'est minimum dix lignes de RP quand tu commences à faire des phrases narratives !
Pour faire moins, il ne faut absolument utiliser que du dialogue... ]

[ Désolée, je croyais que dès qu'il y avait du dialogue, c'était autant de lignes qu'on voulait. Je note ^^ ]

J'étais partagée. A la fois, elle était là et j'avais la possibilité de découvrir ce qui m'intriguait tant chez elle, à la fois si je restait immobile je savais que les souvenirs de Regan allait m'accaparer. Celui qui avait été mon père pendant des années me manquait et cela aurait été mentir que de refuse de l'avouer. Sa pensée m'avait suivie pendant tout le chemin qui m'avait conduit jusqu'ici et je savais qu'il me suivrait toujours. c'est pourquoi j'étais partie sans me retourner. Je n'avais jamais pleurer devant lui et je ne voulais pas qu'il voit mes larmes le jour de partir. Je savais que je ne le reverrai pas avant longtemps et je devais m'y résoudre.

Mais je souris en repensant à la lourde bourse qu'il m'avait laissé quand je lui avais annoncé mon départ. Il avait mis tout ça de côté pour moi. Pour que je puisse en profiter et que je n'aie pas à me débrouiller toute seule.

Je levai les yeux vers l'arbre qui s'étendait au dessus de moi. Il était haut mais les prises étaient faciles. J'avais escaladé bien pire à Al-Jeit. Je souris à se souvenir.

Je me relevai et d'un même mouvement je me hissai sur la première branche qui se trouvait à deux mètres du sol. Je m'assis à califourchon et la regardais.

- Histoire d'arrêter de se morfondre.

[ Pas de soucis, maintenant tu le sais ! ^^ ]



Kaünis haussa les sourcils quand elle vit la fille qui s’éloignait légèrement pour finalement monter dans l’arbre contre lequel elle s’était installée. Puis, elle les fronça : tiens, elle restait là ? Mais pourquoi ? Si elle avait envie de bouger, elle ne l’en empêchait pas !

Levant les yeux vers elle, l’apprentie Envoleuse détailla les branches de l’arbre, larges et porteuses. Faciles à atteindre et à escalader. Un léger soupir franchit ses lèvres, et elle ramena sa tête droite. Son regard foncé passa sur l’horizon. Les étoiles brillaient doucement, comme autant de chandelles à l’infini de la voûte céleste. Elle ne regardait pas souvent les étoiles, malgré la sérénité qu’elle pouvait en tirer, elle préférait dormir. Le sommeil, habituellement, était très important, sinon elle était encore plus acerbe et vraiment pas de bonne humeur, sans ses heures de sommeil.

Mais il la fuyait pour l’instant, et elle ne savait pas trop quoi faire.
Baissant le menton, elle posa son regard sur ses mains, et son regard rencontra le tatouage qu’elle avait entre les seins, qui ne se voyait presque plus – juste une ligne noire remontait un peu plus haut – à cause de ses vêtements presque neufs. Yan comme Fried avaient été surpris de le trouver là, ce qui l’avait faite sourire, même si dans ces moments-là elle avait d’autres choses à penser.

Lâchant un soupir, elle finit par reposer l’arrière de sa tête contre le tronc d’arbre.

- Se morfondre ? Un petit ricanement s’échappa de ses lèvres, Il semblerait que cela soit le propre de l’homme. Jamais content de ce qu’il a… sa voix baissa d’un cran, devenant presque un murmure à peine audible. Il faut toujours qu’on se prenne la tête de trop. C’est pathétique.

Elle ne parlait pas du tout pour la fille, mais plutôt pour elle.
Même si sa phrase pouvait légèrement porter à confusion quant à savoir qui était le sujet, Kaünis ne tenta pas de la reprendre : la fille l’interprèterait à sa convenance, et elle n’avait pas envie de se prendre la tête à une heure aussi tardive.

Je fis une grimace, je ne savais pas trop si je devais le prendre pour moi ou pas. Mais bon, peut être qu'elle cherchait aussi à me faire réagir. Malgré tout... sa voix était lasse. Pas du tout celle qui aurait du se trouver dans la bouche d'une gamine de son âge. Car nous n'étions rien de plus que ça, elle, comme moi.

Qu'avait-il donc bien pu lui arriver pour qu'elle soit aussi fatiguée de la vie à son âge. Je savais que dans certaines contrées la vie était différente et plus dure qu'à Al-Jeit mais à ce point...

Cette fille qui semblait être une solitaire tolérait ma présence depuis tout à l'heure. Tout comme la sienne ne me gênait pas. Des années passées dans les rues m'avaient apprises à être méfiante et surtout à ne pas m'attacher. Mais là, c'était différent.

Qu'allais-je trouver le lendemain à l'Académie ? Y aurait-il beaucoup de monde ? Devrais-je me mêler tout le temps à la foule ? Si oui, je risquais d'avoir un petit problème... La foule ne me gênait pas... tant qu'elle restait loin de moi !

Je baissai les yeux sur la fille qui était restée au pied de l'arbre.

- Qui es-tu ?

- Tu as vraiment besoin de le savoir ?

( ton acerbe )

( ricannement )

- Et toi ? Autant qu'on soit quittes...

( hausse les épaules )
- Histoire que tu ne m'appelles pas "la-fille-chiante-qui-ne-veut-pas-parler" et moi "la-fille-bizarre-aux-cheveux-noirs"...