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 Groupe Aljuin - cours 2

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Giliwyn SangreLune
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeVen 08 Mai 2020, 11:24

- J'ai déjà vu ça une fois. Un jaguar partageant le corps d'un homme. Mais c'était il y a longtemps.

Et je ne l'ai plus jamais revu.

- Pour l'instant, tu vas devoir faire avec ce que tu découvres par toi-même. Le type dont je te parle n'était pas dans ton état quand il reprenait son apparence humaine. Pour lui ç'avait l'air simple. Je suppose donc qu'à la manière d'un muscle, tu vas devoir entraîner cette nouvelle... capacité. Le faire régulièrement, et en tirer à chaque fois les conclusions nécessaires.

Silence songeur et craquement du bois dans le feu.

- Quand tu étais... est-ce que tu m'entendais ? J'ai cru que tu ne me comprenais pas quand je t'appelais.

Il jette un coup d'oeil en direction de Cime.

- Et lui ? Je dois m'attendre à me retrouver avec une autre tronche de cake sur les bras, ou bien... ?
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Neige Mecedora
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeVen 08 Mai 2020, 14:01

- J'ai déjà vu ça une fois. Un jaguar partageant le corps d'un homme. Mais c'était il y a longtemps.

Elle n'était donc pas la seule à être ainsi. La pensée la rassura, tandis que grandissait l'envie de rencontrer cet homme, pour comprendre ce qui lui arrivait et partager sa confusion. Tout ce qu'elle avait cependant, c'était un maître bougon, et c'était déjà beaucoup.

- Pour l'instant, tu vas devoir faire avec ce que tu découvres par toi-même. Le type dont je te parle n'était pas dans ton état quand il reprenait son apparence humaine. Pour lui ç'avait l'air simple. Je suppose donc qu'à la manière d'un muscle, tu vas devoir entraîner cette nouvelle... capacité. Le faire régulièrement, et en tirer à chaque fois les conclusions nécessaires.

Repliant ses genoux contre sa poitrine, elle resta songeuse. Avait-elle envie de recommencer ? Elle sentait l'oiseau dans un coin de son esprit. Elle ne pouvait le refouler indéfiniment, maintenant qu'elle l'avait laissé passer.

S'entraîner à être un oiseau. C'était étrange, pensé ainsi. La prochaine fois, songea-t-elle, elle ferait attention à ne pas avoir ses vêtements sur elle, cependant. Les perdre à chaque fois, très peu pour elle.

Un frisson la parcourut. C'était à la fois effrayant et incroyable. Elle pouvait devenir un oiseau. Elle pouvait littéralement voler. Mais elle avait du chemin, réalisa-t-elle, avant de réussir à prendre le pas sur l'oiseau quand elle le devenait, et ne pas perdre ses vêtements systématiquement, accessoirement.

- Tu m'aideras ?

Elle n'aurait pas songé poser cette question qui d'ailleurs lui avait échappée. Avec un coup au cœur, elle ressentit l'ampleur de la confiance qu'elle plaçait en l'envoleur. Devait-elle craindre que cette confiance soit un jour bafouée, comme cette fois où dans le Lac Chen, son père l'avait laissée se faire noyer par son petit frère ?

- Quand tu étais... est-ce que tu m'entendais ? J'ai cru que tu ne me comprenais pas quand je t'appelais.

Elle resta songeuse quelques instants.

- C'était... flou. L'oiseau dominait sur moi. Je te percevais, mais de loin, et je n'arrivais pas à prendre le dessus. Il te reconnaissait en partie seulement. Je crois que c'est parce que Cime était là qu'il n'est pas parti. Et que j'ai pu redevenir moi-même.

Parlant de Cime...

- Et lui ? Je dois m'attendre à me retrouver avec une autre tronche de cake sur les bras, ou bien... ?

Un rire lui échappa, un peu frêle encore.

- Non, je le connais depuis qu'il est petit, c'est un véritable albatros celui-là.

Avec un brin de chaleur, elle se remémora quand elle l'avait cueillit, abandonné, sur la falaise des Dentelles Vives. Le temps qu'elle avait passé à s'en occuper jusqu'à qu'il devienne assez grand pour, répondant à l'instinct de son espèce, il se débrouille seul.

Peut-être était-ce là la raison de son lien avec l'albatros. Elle en était un aussi – en partie.
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Giliwyn SangreLune
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeVen 08 Mai 2020, 17:01

Gil soupira : c’était au moins ça. Quelque chose lui disait qu’avec une fille-oiseau pour apprentie, il allait avoir du pain sur la planche, et pas qu’un peu.

- Tu n’as plus faim ? Je vais finir alors. Dors un peu.

Il récupéra ce qui restait de pain et de fromage, et mâcha en silence, à la faveur de la nuit. Mais en réalité, ni l’un ni l’autre ne dormit beaucoup cette nuit-là. Au petit matin, Gil réveilla son élève d’un petit coup de botte et ils commencèrent la journée par une séance de décrassage quotidien. Neige n’avait plus l’air aussi choquée que la veille, mais elle semblait claquemurée dans ses pensées - ce qui lui convenait très bien puisqu’il s’était retiré lui aussi dans les siennes. Par chance, elle avait une tenue de rechange. Mais ils auraient un souci si elle engloutissait cette tenue-là dans une prochaine transformation. Tout en courant dans une foulée souple et régulière, Gil secoua la tête : il peinait encore à réaliser, lui qui avait pourtant déjà assisté à une situation aussi incroyable. Son élève pouvait devenir un oiseau. Il leva les yeux et suivit le vol gracieux de l’albatros qui les accompagnait généralement dans leurs sorties matinales. Puis il jeta un coup d’oeil par-dessus son épaule.

- Du nerf, crâne de piaf. Les talons en premier.

Son irritation ne semblait pas vouloir s’émousser alors qu’ils enchaînaient sur une série d’étirements et de renforcement musculaire, et elle était toujours là quand ils bouclèrent leurs affaires pour reprendre la route ; Gil faisait face à sa manière et il lui avait toujours fallu un peu de temps pour digérer certains choses. Au cours de la matinée, alors qu’ils se trouvaient au nord de Fériane, ils traversèrent une petite bourgade dans laquelle ils durent faire une halte : Chante-Brume avait perdu un fer. Agacé d’avoir dû marchander un moment avec la forgeronne du bourg, une bonne femme solide et rustre qui lui tenait tête sans la moindre crainte, Gil suggéra à Neige de profiter de son temps libre pour vadrouiller en toute liberté - et pour s’acheter une tenue de rechange, au cas où. Ils se retrouvèrent deux heures plus tard, et le voyage se poursuivit.

La prochaine halte fut l’occasion de travailler quelque chose qui trottait dans la tête de Gil depuis un bon moment déjà. Ils avaient dépassé la confrérie des rêveurs et atteint une forêt plantée d’érables et de chênes ; laissant les chevaux au niveau des premiers arbres de la lisière, ils s’étaient enfoncés dans le sous-bois frais et parfumé. Quelque part, un pivert s’acharnait de son bec sur un tronc. Le pépiement des oiseaux était omniprésent. Gil avançait tranquillement. Il montra à Neige comment se déplacer silencieusement et s’énerva deux ou trois fois, incapable de comprendre comme une gamine aussi légère pouvait produire le bruit d’un ours élastique. Puis, alors que le soleil dépassait son zénith au-dessus des arbres, il désigna l’arc qu’il lui avait demandé de prendre avec elle.

- Chasser, tu sais faire ?
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Neige Mecedora
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeSam 09 Mai 2020, 06:55

Épuisée, Neige ne rechigna pas quand Gil lui dit de dormir. Sa transformation en oiseau avait pompé toutes ses forces restantes. Lui refilant le pain et le fromage, elle prit le temps de retirer le tabard et d'enfiler sa tenue de rechange avant de se coucher, roulée en boule sous sa couverture.

Elle dormit peu, cependant, son attention toute centrée sur sa métamorphose. Un oiseau, elle pouvait devenir un oiseau. Cela élucidait son lien si spécial avec Cime, et sa folie des hauteurs. Y avait-il là également une explication à son physique et son tempérament si différent de sa fratrie ?

Elle avait trop d'information dans les mains et ne savait quoi en faire. D'où venait ce don pour la métamorphose, pourquoi en oiseau, pourquoi n'en avait-elle jamais entendu parler auparavant ? Et comment le maîtriser ? Si elle devait perdre ses vêtements à chaque fois, cela allait être compliqué. Il faudrait donc qu'elle s'entraîne sans dans un premier temps.

L'idée lui faisait se sentir vulnérable. Elle ne pourrait s'y essayer que dans des endroits déserts, pour éviter de se faire voir ou attaquer. Elle ignorait à quel point ce don pouvait être rare ou non. Et surtout, elle ne savait pas si elle pouvait prendre le dessus sur l'oiseau quand elle se changeait en lui. Si Gil ne l'avait pas appelée, peut-être serait-elle restée albatros.

Oiseau, elle serait restée oiseau. Libérée de la gravité, des chaînes qui la retenait à la terre par deux mètres cinquante d'envergure d'ailes. L'idée lui plaisait sans qu'elle ne se l'avouât vraiment. S'envoler et ne jamais revenir...

Mais elle avait une attache sur terre, qui se présentait comme un maître bougon.

Et bougon, il le fut pas mal, lorsqu'ils se levèrent. Elle-même réfléchissait en boucle sur ce qu'il était arrivé. Et si un jour elle croisait un danger qui ferait ressurgir l'oiseau, pour de bon cette fois ? À qui appartenait ce corps, l'homme ou l'animal ?

Cime se faisait écho de sa nervosité et claqua du bec plus d'une fois en les accompagnant, avant de s'envoler durant leur course matinale.

- Du nerf, crâne de piaf. Les talons en premier.

Levant les yeux au ciel par réflexe, elle se nota cependant que le surnom n'avait jamais été aussi bien choisi.

La pause dans la bourgade fut l'occasion pour elle de s'éloigner un peu de l'irritation constante de son maître, et de s'acheter une tenue ou deux de rechange – autant prévoir. Elle fourra ses achats dans son sac et se promena dans les ruelles, nez en l'air, toujours absorbée par ses pensées, échangeant de temps en temps des regards avec Cime, qui semblait au final le plus apaisé d'eux trois. Puis le voyage reprit.

L'arrêt suivant fut pour s'entraîner à se déplacer, et elle dut bien marmonner une demi-douzaine de « tocard » dans sa barbe lorsque Gil s'agaçait.

- Chasser, tu sais faire ?

Neige secoua la tête. Elle n'avait jamais eu l'occasion de chasser. Si elle s'était déjà tentée à l'arc, petite, elle avait quasiment tout oublié depuis le temps, et l'arme l'encombrait présentement plus qu'autre chose.
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Giliwyn SangreLune
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeSam 09 Mai 2020, 12:21

Son projet allait devoir attendre : il était essentiel que Neige apprenne les rudiments de base d’une bonne chasse. Elle n’aurait pas toujours une auberge ou un commerce à portée de main ; certains endroits de l’empire étaient tellement déserts que l’on pouvait être amené à y errer une bonne semaine sans croiser âme qui vive. C’est ce qu’il lui expliqua avant de lui enjoindre de la suivre en silence. Ensemble, ils se fondirent dans la végétation. Gil était étonnant de contrastes et ce n’était pas nouveau chez lui : alors qu’il pouvait très bien se montrer plus maladroit qu’un gamin empoté dans un magasin de porcelaine, il se déplaçait sans qu’une seule brindille ne craque sous ses semelles. Il avait la souplesse d’un chat, mais c’était un loup en pleine traque qu’il donnait à voir. Il jeta toutefois un coup d’oeil par-dessus son épaule, remarqua les efforts de Neige pour imiter sa furtivité, hocha la tête, et sans réfléchir, il lui fit un clin d’oeil pour rassurer l’oiseau qui vivait en elle. C’était peut-être complètement dingue, songea-t-il en reportant son attention devant lui, mais il devinait que se mettre dans la peau du chasseur et non de la proie n’était pas facile.

Sans échanger la moindre parole, il montra à la jeune fille les empreintes qui marquaient la terre humide. Le gibier qu’il suivait était un chevreuil sans doute assez jeune, étant donné la taille et la profondeur des traces, ou bien une chevrette. Il était passé par ici peu de temps avant eux. Patient, Gil désigna d’autres marques, certaines sur le tronc des arbres, puis il laissa Neige ouvrir ses yeux et les repérer toute seule. Il se plaça même légèrement derrière elle pour la laisser guider leur marche. Lorsqu’il la sentit hésiter, il lui tapota l’épaule et porta la main à son oreille et à son nez. Il fallait s’ouvrir au monde extérieur pour traquer une proie : étendre ses perceptions, devenir écoute absolue, guetter les changements de direction du vent, l’envol d’un oiseau. Cela ne se faisait pas en une seule journée mais en des centaines. Seule l’expérience permettrait à Neige de devenir une chasseuse aguerrie. Gil lui-même avait encore infiniment à apprendre dans ce domaine et, parce qu’il le savait, il ne gâchait jamais un seul instant d’une traque, qu’elle soit fructueuse ou non.

Ils trouvèrent l’animal à l’orée d’une clairière éclaboussée de soleil. Dans l’ombre des fourrés, Gil s’accroupit et observa la chevrette qui grignottait paisiblement les feuilles tombées d’un érable. Le roux vif de sa robe offrait une cible facile, sa taille également, quoi qu’elle arrivait à peine à la hanche de Neige. Mais il se souvenait des premières tentatives de celle-ci au tir et à l’arc et n’était pas certain qu’elle parvienne à l’atteindre en une seul coup. Ce n’était toutefois pas l’objectif de cette chasse. Ce fut donc lui qui attrapa l’arc et encocha une flèche. L’empennage frôla sa joue lorsqu’il relâcha la corde. Le trait traversa l’encolure du cervidé, qui poussa un cri et ploya ses antérieurs et s’effondra dans l’herbe. Gil acheva la chevrette d’un coup de couteau. Il ne faisait jamais souffrir inutilement un animal. Et parce qu’une chasse ne se résumait pas à la traque ni à la touche d’une proie, l’envoleur montra ensuite à Neige comment la dépecer, où placer le couteau pour ne pas abîmer la chair, comment conserver les organes pour les vendre, quels morceaux réserver à sa propre assiette… Il lui montra également comment suspendre le fruit de sa chasse pour qu’un autre prédateur ne vienne pas s’en régaler, puis il l’envoya chercher les chevaux.

En l’attendant, il réunit du petit bois et fit un feu au milieu des fleurs sauvages de la clairière, y ajouta des pierres plates qu’il fit chauffer, tailla des branches pour fabriquer une broche. Au retour de son élève, et après avoir râlé qu’elle avait mis un temps démentiel, il lui enseigna trois façons différentes de cuire la viande et certains organes. La cuisine n’ayant jamais été le fort de Seren, il avait appris seul, en observant les cuisiniers des caravanes qu’il accompagnait. Ses progrès avaient fait un bon phénoménal quand il avait formé Syles, ce dernier étant un véritable chef. Lib avait pris le relais, apportant des variantes à ses recettes. Ce qu’il montra surtout à Neige, c’est que l’expérience s’apprend non pas d’une personne, mais de toutes les rencontres que l’on peut faire au cours d’une vie. Bon prince, il lui permit de manger tranquillement, goûtant lui même avec délice aux grillades comme au ragoût, avant de s’octroyer une petite sieste au milieu des hautes herbes. Ils l’avaient bien mérité, après une nuit aussi courte et remplie d’émotions !

De fait, lorsque Gil réveilla Neige, il était de bien meilleure humeur. Un sourire creusait sa joue quand il fourra l’arc dans les mains de la jeune fille. Pendant qu’elle dormait - lui n’avait eu besoin que d’une vingtaine de minutes pour récupérer complètement - il s’était amusé à transformer la clairière : une multitude de petits panneaux de bois étaient disposés tout autour d’eux, suspendus aux arbres ou appuyés contre les troncs ; de taille et de hauteur différentes, elles constituaient un véritable parcours qu’il lui demanda de réaliser. Evidemment, pour corser l’exercice, il imposa un délais et décida d’un gage pour chaque cible manquée :

- Dix pompes chaque fois que tu en rates une. Quinze si j’entends le mot “tocard”. Pigé ?
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeMar 12 Mai 2020, 15:49

Apprendre à chasser lui serait utile, à n'en point douter. Cela lui éviterait de toujours trimballer de la nourriture sur elle en grande quantité jusqu'à un bourg quelconque pour se ravitailler. Cime, lui, se débrouillait seul, heureusement.

Soudainement perplexe, elle se demanda si, métamorphosée en oiseau, elle aurait aussi besoin de se nourrir sous cette forme, et si elle saurait faire. Elle balaya la question en songeant que de toute manière, elle ne contrôlait pas assez bien ses transformations pour le moment, et que l'animal prenait le dessus pour le moment. Il lui faudrait un bon entraînement et de multiples métamorphoses pour s'attarder plus avant sur cette idée de chasse sous forme animale.

Au pire, pensa-t-elle en regardant Cime qui les surplombait d'une branche d'un arbre, elle aurait son âme sœur pour la guider. C'était lui, avec l'appel de Gil, qui lui avait permis de redevenir elle-même. Elle savait qu'elle pouvait compter sur l'oiseau pour la guider et l'aider.

Se détournant de l'albatros, elle suivit Gil sous le couvert des arbres, un brin impressionnée par sa marche totalement silencieuse. Elle s'appliqua à faire de même, fut un brin déstabilisé par le clin d’œil qu'il lui adressa mais n'en montra rien.

Elle décida de plutôt se concentrer sur sa marche, tâchant d'imiter son maître en observant sa façon de se déplacer. Eviter les brindilles en les contournant ou en glissant le pied dessous pour les écarter du chemin, éviter les tas de feuilles morts sèches et craquantes... Toute son attention était focalisée dessus. L'oiseau en elle s'était tu.

D'ailleurs, remarqua-t-elle fugacement, depuis la transformation, il se faisait moins... présent. Il la tiraillait moins. La boule était toujours là, mais en recul. Elle disparaîtrait, comprit-elle, quand elle maîtriserait totalement l'oiseau en elle.

Elle revint à la réalité quand il commença à lui montrer les empreintes, les diverses traces que laissaient un animal sur son chemin et ne protesta pas quand il la fit passer devant lui. C'était étrange, songea-t-elle, de chasser de cette façon alors qu'en elle sommeillait un oiseau. Une proie, plus qu'un prédateur. Est-ce que chercher à contrarier cette nature allait avoir des répercussions ? Elle n'en savait rien.

L'apprentie se plaça près de Gil lorsqu'il s'accroupit pour encocher une flèche, attentive. Maintenant que la boule dans son ventre avait régressé, elle avait le sentiment d'être moins entravée et d'avoir l'esprit plus libre. Ce ne pouvait être que favorable.

Un frisson parcourut son échine au cri que l'animal fit quand la flèche le transperça. Sa part animale se sentit menacée, et elle dut faire des efforts pour suivre Gil hors de leur cachette. Elle fut soulagée quand il abrégea les souffrances de l'animal.

Bien qu'un brin déboussolée par les émotions ressenties auparavant, elle tâcha de se concentrer quand son maître lui montra comment dépecer l'animal, garder les organes, que manger... Ce fut en hochant silencieusement de la tête qu'elle partit au pas de course chercher les chevaux. Le retour fut plus laborieux – son poids plume pour traîner deux canassons n'était pas aisé et se contenta de lever les yeux au ciel quand elle se fit réprimander.

Commençant à être affamée, elle se refit attentive lorsqu'il lui enseigna comment cuire la viande de l'animal, et, une fois cuite, s'y attaqua avec appétit. La sieste qu'il leur permit ensuite finit de la remettre d'aplomb.

Et Gil aussi, apparemment, au vu des cibles un peu partout et de l'arc qu'il lui refila. Elle soupira, sachant cependant qu'elle devait en passer par là. C'était finalement un soupir pour la forme, pour agacer son maître plus que pour réelle lassitude.

- Dix pompes chaque fois que tu en rates une. Quinze si j’entends le mot “tocard”. Pigé ?


- Ça va me faire beaucoup de pompes, ça, railla Neige, un sourire au coin des lèvres.

Elle encocha cependant sa première flèche, tira sur la corde de l'arc et visa sa première cible ; comme attendu, elle passa largement à côté. Refusant de lui faire le plaisir de le traiter de tocard, elle reposa l'arc sans mot dire et entama sa première série d'une, elle le pressentait, longue série de pompes.

* * *

Les bras en compote, les abdominaux criant de douleur, Neige baissa son arc. Elle avait réussi à mettre quelques cibles, en avait raté pas mal, et les séries de pompes ainsi que le tir sur la corde avaient mis son corps au supplice. D'un regard, elle interrogea son maître. Une pause était-elle possible ?
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Giliwyn SangreLune
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeVen 15 Mai 2020, 10:49

Gil avait bâillé, s’était étiré, joué avec un poignard et même discuté avec les chevaux pendant que Neige s’escrimait à toucher les cibles ; toutefois, cette nonchalance apparente ne l’avait pas empêché de l’observer attentivement. Elle avait fait davantage de pompes que de tirs. Son plus grand atout reposait sur une détermination aussi solide que la vergalite, son principal défaut était la trop grande part qu’elle accordait à la réflexion.

Il s’approcha d’elle alors que, les bras tremblants, elle baissait son arc.

- Tu ne te décides pas assez vite.

Devant sa mine perplexe, il lui prit l’arc des mains, notant au passage les ampoules que le bois de l’arme avait fait naître sur sa peau, et encocha une flèche imaginaire pour pincer la corde et l’amener à sa joue.

- Plus tu prends le temps de viser, moins tu optimises la puissance, la vitesse et la précision de ton tir : tes muscles sont soumis à une trop forte tension. Dans ton cas, c’est accentué par l’effort des pompes et c’est pour ça que tes tremblements t’empêchent de faire mouche. Tu échoues en ne voulant pas échouer. Tu échoues parce que j’ai fait en sorte que ce soit le cas.

Gil relâcha sa position pour regarder Neige dans les yeux.

- Echouer est le meilleur moyen d’apprendre une leçon de choses. Se servir de l’échec est une attitude intelligente. Plus intelligent encore : ne pas échouer…

L’arc retourna entre les mains de l’élève.

- Recommence. Cette fois-ci, en cas de cible manquée, tu feras des abdominaux. Encoche, bande, vise, tire. N’accorde pas plus de temps que nécessaire à une réflexion qui peut te coûter la vie. N’échoue pas, demi-portion.

L’exercice reprit son cours.

Et Gil recommença à bâiller aux corneilles.


*

Il revint plus tard sur cette notion de réflexion, qu’il savait être un écueil épineux dans le cheminement de la pensée comme dans le parcours de formation d’un apprenti qui a soif d’apprendre. Neige et lui chevauchaient tranquillement sur un sentier qui sinuait entre des collines.


- Agir sans réfléchir peut s’avérer tout aussi dangereux qu’agir après avoir réfléchi trop longtemps. Il y a un juste milieu à trouver et c’est dans ce juste milieu que réside ce que j’appelle le “bon temps”. Le moment propice à toute action menée.


Le jour s’étirait, le soir prenait ses droits, prélude aux ombres de la nuit qui ne manqueraient pas d’être au rendez-vous d’ici une heure environ. Pour l’instant, le soleil plongeait derrière les montagnes, droit devant eux, et offrait au ciel crépusculaire ses lettres de noblesse en le peignant de toutes les teintes de rouge possible, depuis l’amarante jusqu’à l’incarnat, en passant par le rose, le violine et l’orangé le plus subtil. L’albatros de Neige les suivait en volant et c’était comme s’il baignait ses plumes dans cet océan de couleurs.


- Tout choix à faire engage une réflexion. Lorsque tu tires une flèche, tu dois choisir la cible et le meilleur angle de tir, en fonction des conditions extérieures - le vent, la lumière dans les yeux, la distance… Réfléchis. Longuement, rapidement, jusqu’à trouver le bon temps. Réfléchis, et n’oublie pas de ne pas laisser contribution à l’adversaire lors de cette réflexion. Ou, dans le cas de tout à l’heure, à une trop grande fatigue musculaire. Et maintenant, chut.


Oui, il lui demandait de se taire alors que c’était lui qui causait depuis tout à l’heure ! Mais on en était arrivé à l’entre chien et loup, ce moment de la journée qu’il préférait d’entre tous ; se renversant légèrement en arrière sur sa selle, Gil lâcha les guides de Chante-Brume, croisa les mains derrière sa nuque et, un sourire accroché aux lèvres, se délecta du spectacle de la nature.


*


Autre journée.
Autre forêt.

Ils se trouvaient au pied des premières montagnes délimitant le territoire de l’empire. Au cours des deux derniers jours, l’essentiel de leurs activités s’était résumé à la course, aux premières lueurs du jour - Gil se plaisait à rallonger le temps, le parcours et l’allure, obligeant Neige à repousser ses limites à chaque séance -, au soin des chevaux, évidemment sollicités par le voyage, et au perfectionnement du tir, que ce soit à l’arc ou avec un poignard ; les cibles variaient, les consignes également, mais toujours dans le but de chercher à moduler cette réflexion jusqu’à trouver ce fameux “bon temps”. Il avait fourré dans la poche de son apprentie un petit pot d’onguent, destiné à apaiser ses ampoules, et chaque soir il la contraignait à une série d’étirements qui avait pour but de soulager les tensions musculaires. Dans le même temps s’installait une routine qui, loin d’être désagréable, leur permettait de mieux s’accorder. Gil ne se privait pas d’enquiquiner Neige et accueillit chacune de ses réparties avec un creux de sourire dans la joue qui en disait long sur ce qu’il pensait vraiment. Il grognait souvent, était avare en compliments, mais un clin d’oeil de sa part réaffirmait généralement la volonté de Neige et calmait les esprits.

- Pied à terre.

Gil avait déjà bondit souplement de sa selle. Pendant que Neige faisait de même, il détacha le sac de vivres et en préleva un peu qu’il transvasa dans le sac de la jeune fille, puis il vérifia son stock de pansements et de simples qu’il compléta avec ce qui lui paraissait manquer. Enfin, il attrapa l’arc et le carquois rempli de flèches, et les tendit à Neige.

- Tu vas en avoir besoin.

Pourquoi ? semblaient dire les grands yeux bleus. L’envoleur écarta les bras, désignant les arbres de la lisière à laquelle ils se trouvaient.

- Tu vas partir seule pendant quelques jours. Ton objectif : trouver la rivière. Elle est loin et tu n’as pas de carte. Tu vas donc devoir te démerder avec ce que tu as.

Le soleil, la mousse sur le tronc des arbres, le bon sens…

- Tu as le strict minimum avec toi, tu devras donc chasser pour te nourrir. Je garde ton cheval et le reste des affaires.

Il lui céda toutefois une couverture et bien sûr, une gourde d’eau pleine. Puis il la regarda pensivement.

- Profites-en pour… comprendre l’oiseau qui sommeille en toi.

Si l’exercice en solo était prévu depuis un moment, la récente aptitude de Neige à devenir un oiseau avait donné de quoi réfléchir à Gil : était-elle prête à faire face à cette réalité en étant seule ? Tu ne l’es pas, affirma-t-il avec la simple force de son regard bicolore plongé dans le sien. Je suis là même quand tu ne me vois pas. Ce n’était pas une menace, plutôt une promesse ; il n’allait pas se tourner les pouces pendant que Neige allait vadrouiller par ses propres moyens. Il la suivrait sans la coller, lui accordant cette intimité nécessaire pour s’épanouir, se révéler peut-être, mais il serait prêt à intervenir en cas de besoin. Il se remit en selle, déployant encore cette grâce du fin cavalier qu’il était et qui contrastait toujours autant avec ses manières d’ours brutal, et se pencha pour saisir les rênes de Thunder.

- Je t’attendrai près d’un pont brisé en son milieu, plutôt en aval de la rivière. Tu ne devrais pas pouvoir le rater. Si tu n’es pas là dans trois jours, tu devras cirer mes bottes et faire mon thé jusqu’à ce que je décide que tu n’as plus à le faire. Oh, et, Neige ?

Chante-Brume avait fait quelques pas déjà, mais il l’avait arrêtée dans son élan pour se retourner sur sa selle.

- Comprendre n’est pas seulement réagir, c’est aussi accepter une situation, et la retourner. A dans trois jours, morveuse.

Il s’éloigna en sifflotant gaiement. Curieusement, Cime le suivit une dizaine de minutes avant de finalement rebrousser chemin ; l’oiseau s’accommodait-il de sa présence, ou s’incommodait-il de celle de son homologue secret ? Sans réponse, Gil haussa les épaules. Ne plus chevaucher aux côtés de son élève était étrange et même vaguement troublant, mais il était sûr de sa décision : seule, Neige allait devoir mettre en pratique ce qu’elle avait appris à ses côtés, et mobiliser bien des compétences si elle voulait éviter les ennuis. Une bonne partie de sa progression reposait sur son aptitude à se débrouiller par ses propres moyens. En outre, c’était l’occasion pour elle de se trouver en tête à tête avec… eh bien, le piaf qui semblait partager son existence. L’instinct de Gil lui soufflait qu’en dépit de tout le soutien dont il faisait preuve, c’était une rencontre qui devait se fortifier dans l’intimité. Un grand sourire illumina son visage - il pouvait se le permettre, à présent qu’il n’avait plus la gamine dans les pattes. Il avait hâte de voir ce que cette expérience allait donner !



[Je te laisse vivre ces trois journées (ou plus ^^) à ta guise : Gil n'est pas loin en cas de besoin, sinon il sera au pont, comme convenu  Wink]
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Neige Mecedora
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeSam 16 Mai 2020, 19:56

- Tu ne te décides pas assez vite.

Neige jeta un regard perplexe à son maître ; comment cela, elle ne se décidait pas assez vite ? Ne fallait-il pas de la réflexion avant de viser ? Elle lui laissa l'arc et étira longuement ses bras malmenés par les pompes et les tirs à répétition.

- Plus tu prends le temps de viser, moins tu optimises la puissance, la vitesse et la précision de ton tir : tes muscles sont soumis à une trop forte tension. Dans ton cas, c’est accentué par l’effort des pompes et c’est pour ça que tes tremblements t’empêchent de faire mouche. Tu échoues en ne voulant pas échouer. Tu échoues parce que j’ai fait en sorte que ce soit le cas.

Attentive, elle le fixa et plongea dans ses yeux. Elle ne comprenait pas l'intérêt de l'avoir fait échouer ainsi. Elle pouvait cependant entendre que prendre le temps de viser était contre-productif ; en situation réelle, face à un ennemi, elle ne pouvait prendre le temps de réfléchir et de viser. Toujours dubitative, elle écouta sa tirade suivante.

- Echouer est le meilleur moyen d’apprendre une leçon de choses. Se servir de l’échec est une attitude intelligente. Plus intelligent encore : ne pas échouer…

C'est bien joli, songea-t-elle, mais s'il faisait en sorte de la faire échouer, elle n'irait pas très loin comme ça. Elle se reprit, songeant qu'elle faisait preuve de mauvaise foi. Il y avait une véritable leçon dans les paroles de Gil, qu'elle ne devait pas laisser passer. L'échec était un promontoire pour réussir. Il était parfois essentiel.

D'où peut-être les pompes liées aux tirs inutiles. Échouer pour réussir... Elle reprit son arc sans avoir le temps de s'appesantir sur l'idée.

- Recommence. Cette fois-ci, en cas de cible manquée, tu feras des abdominaux. Encoche, bande, vise, tire. N’accorde pas plus de temps que nécessaire à une réflexion qui peut te coûter la vie. N’échoue pas, demi-portion.

Elle leva les yeux au ciel pour la forme et banda l'arc, tirant la corde jusqu'à sa joue, pour relâcher aussitôt le trait, qui fila pour se planter dans une cible.

Déjà mieux, songea-t-elle.

Et elle recommença.

* * *

La leçon ne l'avait pas empêchée de devoir faire des séries d'abdominaux, et elle avait dû effectuer une série d'étirements pour empêcher de prochaines courbatures, avant de remonter sur Thunder pour chevaucher aux côtés de Gil.

Qui n'avait pas terminé sa leçon.

- Agir sans réfléchir peut s’avérer tout aussi dangereux qu’agir après avoir réfléchi trop longtemps. Il y a un juste milieu à trouver et c’est dans ce juste milieu que réside ce que j’appelle le “bon temps”. Le moment propice à toute action menée.

En silence, elle intégra les paroles, les fit longuement tourner dans son esprit. Elle devait donc atteindre ce « bon temps », entre la réflexion et la spontanéité, tant dans le tir à l'arc que dans ses autres mouvements, devinait-elle.

La nuit s'étirait peu à peu, annoncé par un magnifique couché de soleil. Confortablement calée sur sa selle, admirant le spectacle, Neige écoutait toujours Gil.

- Tout choix à faire engage une réflexion. Lorsque tu tires une flèche, tu dois choisir la cible et le meilleur angle de tir, en fonction des conditions extérieures - le vent, la lumière dans les yeux, la distance… Réfléchis. Longuement, rapidement, jusqu’à trouver le bon temps. Réfléchis, et n’oublie pas de ne pas laisser contribution à l’adversaire lors de cette réflexion. Ou, dans le cas de tout à l’heure, à une trop grande fatigue musculaire. Et maintenant, chut.

Elle leva les yeux au ciel – elle n'avait pas décroché un mot depuis le début de la leçon, concentrée – mais ne dit rien, habituée maintenant au comportement de son maître. Elle décida de faire comme lui et s'abîma dans les couleurs chatoyantes qui laissaient peu à peu place à l'obscurité de la nuit, réfléchissant longuement aux paroles de son maître.

* * *

Les jours suivant se ressemblèrent, ce qui en soit était apaisant. Elle cherchait toujours le temps dont lui avait parlé Gil – ou « tocard » quand il commençait à trop lui courir sur le système –, jetant des regards envieux aux montagnes, prise par l'envie de les escalader, sans cependant en faire part à son maître. Elle et l'escalade, c'était une longue histoire d'amour, qu'elle avait laissé paraître lors du primer cours, tandis qu'ils grimpaient une tour, mais qu'elle continuait à garder un peu pour elle.

Elle continuait à prendre goût aux leçons de Gil, repoussant ses limites avec sa détermination habituelle, décidée à abandonner que lorsque l'effondrement la guettait, s’appliquant dans tout ce qui lui était demandé ; s'améliorant peu à peu, inéluctablement, jonglant entre arc et poignard, cherchant toujours ce fameux « bon temps » qui lui échappait encore, tout en s'écharpant amicalement et oralement avec son maître.

La routine fut finalement brisée par trois petits mots.

- Pied à terre.

Neige glissa de son cheval, intriguée, le regardant fourrer des vivres dans son sac et en vérifier le contenu. Ses yeux clairs demandaient une explication, tandis qu'elle saisissait les armes qu'il lui tendait.

- Tu vas partir seule pendant quelques jours. Ton objectif : trouver la rivière. Elle est loin et tu n’as pas de carte. Tu vas donc devoir te démerder avec ce que tu as. Tu as le strict minimum avec toi, tu devras donc chasser pour te nourrir. Je garde ton cheval et le reste des affaires.

Elle médita sur ses paroles. Elle n'avait jamais été lâchée comme ça en pleine nature avec un objectif de ce genre. Cependant, les années passées à faire des aller-retour entre l'exploitation de sa famille et les falaises des Dentelles Vives lui avaient appris à se repérer un peu. Cela, et ses vagabondages plus récents, entre les deux cours avec lui.

- Profites-en pour… comprendre l’oiseau qui sommeille en toi.

Elle leva les yeux vers lui, les verrouilla dans le regard vairon. Ce qu'elle y lut la rassura. Il ne serait pas loin. Il ne serait jamais loin. Cette certitude finit de la rassurer ; elle trouverait la rivière, et survivrait seule dans la forêt. Quant à l'oiseau... Ses yeux dérivèrent vers Cime. Ce dernier était une accroche à sa part humaine. Elle pouvait tenter d'apprivoiser cet animal en elle avec l'aide de son albatros. Son regard revint à son maître, qui se remettait en selle, tandis qu'elle juchait son sac sur son épaule.

- Je t’attendrai près d’un pont brisé en son milieu, plutôt en aval de la rivière. Tu ne devrais pas pouvoir le rater. Si tu n’es pas là dans trois jours, tu devras cirer mes bottes et faire mon thé jusqu’à ce que je décide que tu n’as plus à le faire. Oh, et, Neige ? Comprendre n’est pas seulement réagir, c’est aussi accepter une situation, et la retourner. A dans trois jours, morveuse.

Elle roula des yeux.

- Compris, tocard. Tes chaussures, tu les cireras toi-même.

Elle fit volte-face et s'enfonça sous le couvert des arbres, retenant cependant sa dernière phrase – enfin, avant-dernière, plutôt. Qu'avait-il voulu dire par là ? Retenant un soupir, elle commença à marcher à travers les arbres, remarquant l'absence de Cime. Ne s'en inquiétant pas outre mesure – l'oiseau revenait toujours à elle –, elle continua son chemin.

Trouver la rivière. Songeuse, elle passa la main dans ses cheveux toujours emmêlés, s'arrêta le temps d'en faire une queue de cheval, puis reprit sa route. Là où il y avait rivière, il y avait humidité. Elle stoppa de nouveau, cherchant un souvenir dans sa mémoire. Quand elle avait rencontré Lou, elle se trouvait au bord du Pollimage. À quoi ressemblaient les arbres proches ? De la mousse, se rappela-t-elle, ils avaient de la mousse à cause de l'humidité du fleuve.

Elle pouvait également s'éclairer en grimpant en haut d'un arbre, songea-t-elle. Elle recommença à marcher, cherchant à travers les troncs celui qui semblait s'élever le plus haut. Cime finit par revenir, et elle le regarda, regrettant de ne pouvoir s'élever aussi haut que lui pour repérer la rivière en question.

S'élever. Oui, elle pouvait essayer de se changer en oiseau. Lâchant son paquetage, elle ôta ses habits – prévoyante – et les accrocha à un branche basse. Elle siffla, et son albatros descendit pour s'installer près d'elle.

- Ok, Cime, entama-t-elle, je vais essayer de me changer en... en oiseau. Tu restes près de moi, d'accord ? J'aurais besoin de toi.

Elle s'assit sur le tapis de feuille morte, croisa les jambes et s'adossa à un arbre.

Plongea en elle.

L'oiseau s'éveille.

L'humaine lui a cédé la place.

Curieux, il regarde autour de lui. Il se trouve dans une forêt, cette fois. L'autre oiseau est toujours là. Il se souvient que c'est aussi à cause de lui qu'il est redevenu une humaine. Il s'agite. Va-t-il recommencer ?

Calme-toi, lui communique l'autre albatros.

Mais il ne veut pas se calmer. Il veut s'élever vers les cieux, enfin libéré de l'enveloppe corporelle humaine. Il ne veut plus lui céder la place pour somnoler au fond d'elle.

Il déploie les ailes, tandis que l'autre oiseau lui souffle « reviens, reviens ».

Peu à peu, il se sent partir, déçu, remplacé par l'humaine qui force le passage.


Se secouant, en nage, Neige leva son regard sur Cime, qui s'agitait, inquiet.

- Ça ne sera pas facile, pas vrai ? lui souffla-t-elle.

Elle se rhabilla, secouée de frissons, et pris son arc.

- Il est temps d'essayer de chasser, murmura-t-elle.

* * *

Au final, ses tentatives de chasse furent inutile. Elle avait bien repéré un chevreuil, mais sa flèche partit après qu'il se soit enfui, alerté par le bruit qu'elle faisait. Se maudissant, et voyant le soleil se coucher, elle grimpa à la cime d'un arbre pour s'installer pour la nuit. Son albatros se jucha sur une branche proche.

Soupirant, elle se tourna vers lui.

- Et toi, tu voudrais pas me pêcher quelques poissons, pour changer ?

L'oiseau lui retourna un regard impassible. Un autre soupir lui échappa.

- C'est bon, j'ai compris. On dirait que tu t'es mis d'accord avec l'autre tocard pour m'emmerder. Stupide piaf.

Elle grogna entre ses dents.

- Et voilà que je me mets à parler comme lui.

Elle finit par s'endormir, roulée en boule sous la couverture.

* * *

Le jour suivant, elle prit le temps de repérer un arbre assez grand en haut duquel elle grimpa. Elle parvint ainsi à repérer la rivière dont il était question et commença sa progression vers elle.

Lors de ses pauses, elle s'entraînait au lancer de poignard ainsi qu'à l'arc, et essayait de chasser. Elle tentait chaque soir de renouer avec l'oiseau en elle. Elle repéra la rivière lors du second jour, et la remonta tranquillement.

Ce fut lors d'une de ses pauses qu'elle remarqua une chevrette qui buvait dans la rivière. S'immobilisant, Neige sortit lentement son arc, encocha une flèche ; et le temps d'une expiration, la relâcha, pour voir le trait se planter dans la gorge de l'animal, qui s'effondra. En quelques mouvements, l'apprentie fut près de l'animal et l'égorgea proprement, comme elle avait vu Gil le faire.

Plutôt satisfaite de cette performance, elle dépeça l'animal, se remémorant l'exemple de son maître, et quelques minutes plus tard, elle faisait griller la viande, ravie d'avoir réussi et enfin de la nourriture en plus dans son sac.

Une heure plus tard, elle remontait la rivière en direction du pont dont avait parlé Gil. Une dernière fois, cependant, elle se replia dans les bois pour retenter de communiquer avec l'oiseau qui se logeait en elle. Se déshabillant, elle s'appuya contre un arbre, ferma les yeux, respirant profondément, et repartit à la recherche de cette partie d'elle-même.

L'oiseau s'éveille.

Cette fois, l'humaine n'est pas en retrait. Elle tente de communiquer avec lui. De faire corps avec lui. Comme s'ils n'étaient qu'un.

Il est dubitatif.

Mais l'autre albatros est là et l'encourage à accepter.

Alors, peu à peu, il se fond avec elle pour ne devenir qu'un.

Neige ouvre les yeux.

Elle est oiseau, comprend-t-elle.

Puis le lien se rompt.


Neige revint à elle, un peu étourdie. Elle était parvenue à se fondre dans l'oiseau, mais seulement un bref moment. Il lui faudrait du temps pour que l'albatros ne prenne pas le dessus, comprit-elle. Cela allait. Elle avait tout son temps.

Elle se rhabilla, prit son paquetage et partit en direction du pont dont lui avait parlé Gil.

Elle y parvint le soir du troisième jour.
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Giliwyn SangreLune
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeMer 20 Mai 2020, 22:43

Adossé au mur du pont brisé, les bras croisés sur la poitrine, Gil regarda Neige approcher. Quelque chose brillait au fond de ses yeux, lueur malicieuse de celui qui sait mais qui ne dira rien ; la gamine savait-elle que ces trois derniers jours, il avait été à la fois très proche et très distant ? Qu’il n’avait rien manqué de son voyage, sans pour autant s'immiscer dans ce trajet solitaire ? Que, dans ce paradoxe inconcevable, résidait toute la puissance d’un homme capable de devenir invisible, et de tout voir ? Il se contenta de la saluer en portant deux doigts à sa tempe. Puis il l’observa, cette jeune fille menue, discrète et rêveuse. Elle n’avait pas l’allure d’un mercenaire, mais elle en avait l’âme. Et… elle dégageait une tranquille assurance qu’il ne lui connaissait pas. C’était nouveau, ça. Il songea que ça lui allait plutôt bien. Il finit par décoller son dos des pierres chauffées par le soleil.

- Alors, c’était comment ?

Il l’invita à s’asseoir avec lui dans l’herbe, pour lui prouver qu’il ne plaisantait pas : en dépit de ce qu’il avait appris ces derniers jours, il souhaitait que ce soit elle qui parle. Parfois, mettre en mot un certain vécu était nécessaire pour l’ancrer dans la réalité. Il l’écouta attentivement, s’autorisant quelquefois de petites piques qui lui revenaient généralement en pleine figure, accompagnées d’un “tocard” bien senti. Il se faisait au surnom, lequel se rapprochait vaguement de “cabochard”, et qui, il fallait l’admettre, lui allait comme un gant. Personne d’autre n’aurait jamais le droit de l’appeler ainsi sans en payer le prix, et cet accord tacite entre Neige et lui renforçait encore ce lien qui était né entre eux. Le soir tombait doucement, illuminant le ciel au-dessus de leurs têtes. Il était temps, enfin, de mettre en oeuvre ce que Gil avait conçu dans sa tête depuis déjà une bonne semaine. Il se leva et commença à se déshabiller.

- Arrête de te rincer l’oeil et bouge-toi, lança-t-il, un soupçon d’amusement dans la voix.

Son corps dénudé offrait pourtant un spectacle peu commun : tout en muscle et en finesse, couturé de cicatrices, certaines réellement impressionnantes et témoins de nombreuses occasions de croiser la mort de près, ce corps avait la souplesse d’un fauve et la force d’un loup. Le soleil avait bruni sa peau puisqu’il ne portait plus de chemise depuis des semaines, sous son tabard. Abandonnant leurs affaires près du pont, il descendit le long de la rive et entra dans l’eau de la rivière. Elle était glaciale : il allait entendre chanter du “tocard” dans très peu de temps… Sans paraître affecté par le froid mordant de l’onde, il plongea sous la surface et remonta au beau milieu du courant. Vif et traître, celui-ci aurait dû l’emporter. Mais non. Debout, solide sur ses jambes, Gil ne bougeait qu’au gré de son envie : il apprécia la fougue de l’eau sur sa peau, le froid qui délassait ses muscles après une journée passée à cheval, et il plongea de nouveau. Le souvenir de Khia effleura sa mémoire. Il sourit, creva la surface, ramena ses cheveux en arrière et chercha Neige du regard.

- Bon alors, c’est pour aujourd’hui ou pour demain ? Crois-en la finesse de mon flair : tu as grand besoin d’un bain, morveuse.

C’était le coup à se faire noyer en guise de représailles, mais pour cela, il fallait d’abord qu’elle le rejoigne au milieu de la rivière. Et si elle y parvenait, qu’elle parvienne à se maintenir debout. Un demi-sourire creusa un pli dans sa joue gauche : ça allait être drôle.

- Le parcours des débutants est juste ici, ajouta-t-il en désignant le pont du pouce.

Entre les deux parties brisées se trouvait une corde battue par les flots. Ce serait son unique point d’ancrage. Si elle se laissait emporter par le courant, il lui faudrait se débrouiller pour gagner la berge avant d’être happée par la chute d’eau qui se trouvait à quelques mètres de là. Gil la laisserait-elle aller jusque-là ? Quiconque le connaissait pouvait émettre quelques doutes : après tout, il avait bien mis le feu au Domaine lors de son cours avec ses tout premiers élèves… Un oeil affûté remarquerait pourtant qu’il s’était placé derrière la corde, et que sa décontraction apparente était feinte. Si jamais Neige ratait la corde, elle n’irait sans doute pas très loin. Le danger demeurait. Le froid, la fatigue, la force des courants, les rochers glissants, les arêtes coupantes ; il allait falloir composer avec tout cela le temps de l’exercice. Encore fallait-il en dessiner les consignes.
Et préciser son objectif.

- L’eau est un élément redoutable. Si tu es capable de lui imposer ta volonté, de braver cette force de la nature, alors tu sauras un jour utiliser cette force à ton avantage, et au désavantage de ton adversaire. Allez Neige, viens.

Il cligna des yeux : c’était la première fois qu’il l’appelait par son prénom et il se demanda si elle avait tiqué elle aussi.
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeDim 31 Mai 2020, 12:27

Neige leva les yeux vers Gil et marcha tranquillement pour le rejoindre. Elle avait l'étrange sentiment de ne pas l'avoir quitté durant ces trois jours, et au final, elle n'aurait pas été étonnée d'apprendre qu'il l'avait constamment suivie sans entrer dans le champ de sa perception. À la fois proche et lointain. Elle plongea ses yeux clairs dans ceux vairons et y lut une confirmation. Lui vint l'envie de hausser les épaules. Cela ne l'étonnait guère, surtout de sa part.

Elle eut un moment de réflexion. Surtout de sa part. Quand est-ce que Gil était devenu quelqu'un qui, elle le savait, ne la lâcherait pas ? Quand elle l'avait vu, misérable, mais qu'il l'avait quand même invitée à le rejoindre pour ce second cours ? Quand il avait prononcé son nom quand l'oiseau dominait ?

Incapable de donner une réponse, elle se contenta de répondre à son salut et s'approcha de lui.

- Alors, c’était comment ?

Neige prit le temps de s’asseoir à ses côtés. Et elle raconta. Elle raconta les échecs de sa chasse puis, vers la fin, une victoire. Elle raconta l'oiseau, beaucoup, et Cime qui restait près d'elle à chaque fois pour que sa partie humaine reprenne le dessus. Cime qui en ce moment même, désintéressé, pêchait tranquillement dans la rivière, alors qu'il ne l'avait quasiment pas quittée durant son périple.

Ils échangèrent quelques piques, des surnoms, des commentaires. Elle se sentait bien, à discuter ainsi avec lui, à sentir ce lien entre eux. Elle fut cependant prise au dépourvu quand elle vit Gil se lever pour se déshabiller. Qu'est-ce qu'il comptait faire, prendre un bain, là, comme ça ?

- Arrête de te rincer l’oeil et bouge-toi.

- Parce qu'il y a quelque chose à mater ?
répliqua-t-elle immédiatement.

Non qu'il soit laid, mais cela ne l'intéressait pas plus que ça. Le sexe, la nudité, étaient des notions assez abstraites pour elle. Neige n'avait jamais eu l'occasion de se socialiser suffisamment pour que cela prenne une importance à ses yeux, ayant toujours fui autrui pour ses falaises. Elle faisait son travail de socialisation avec un envoleur mal-luné et abondamment surnommé de tocard... Pas la meilleure chose qui puisse lui arriver, donc.

Ses yeux glissèrent néanmoins sur toutes ces cicatrices, et elle s'interrogea sur leur provenance. Elle ne lui poserait toutefois pas la réponse, mais elle se demanda si elle aussi, un jour, finirait comme ça, couturée de partout. Elle avait déjà quelques marques, laissées par ses escalades, mais rien d'aussi impressionnant. Tous les envoleurs portaient-ils de telles marques ?

Elle écarta la question. Comme la nudité, les cicatrices ne l'effrayaient pas. Si elle devait en avoir, elle en aurait, et puis c'est tout. Elle revint à son maître, qui s'avançait effectivement dans la rivière. Se redressant, elle le regarda plus attentivement. Nullement affecté par la force de l'onde, il semblait s'en jouer. Un mauvais pressentiment lui vint sur son prochain exercice.

- Bon alors, c’est pour aujourd’hui ou pour demain ? Crois-en la finesse de mon flair : tu as grand besoin d’un bain, morveuse.

- Tu peux parler !


Elle se déshabilla cependant à son tour, laissa ses vêtements à côté de ceux de son maître et s'approcha de l'eau, circonspecte.

- Je t'ai déjà dit que je ne savais pas nager ?

C'était la vérité. Bien qu'habitant près du Lac Chen, une mauvaise expérience l'avait découragée de s'y baigner. C'était rien, juste une sortie avec ses frères et son père qui voulait leur apprendre à nager, justement ; mais l'un de ses frères s'était amusé à lui maintenir la tête sous l'eau malgré ses mouvements de protestation, et quand, ressortant de l'eau, elle avait vu son père impavide malgré son essoufflement et qu'elle se fut étranglée avec l'eau, cela l'avait découragée de recommencer l’expérience.

- Le parcours des débutants est juste ici.

Elle suivit son doigt du regard, remarqua la corde ; au moins, elle ne se noierait pas aujourd'hui. Elle ne se noierait pas tout court tant qu'elle serait sous la tutelle de son maître, elle le savait. Elle plongea la main dans l'eau, grimaça en sentant le froid glacial, se redressa, franchement dubitative.

- L’eau est un élément redoutable. Si tu es capable de lui imposer ta volonté, de braver cette force de la nature, alors tu sauras un jour utiliser cette force à ton avantage, et au désavantage de ton adversaire. Allez Neige, viens.

Neige. Il l'avait appelée par son prénom – comme cette fois où elle s'était changée en albatros. Elle lui glissa un regard étonné teinté d'un étrange sentiment, mélange de reconnaissance et d'affection. C'est qu'elle l'appréciait, ce tocard aux rudes paroles et au corps parsemé de cicatrices. Il avait fallu le temps de s'apprivoiser, avec lui qui ne voulait pas d'elle au départ, et elle qui s'était accrochée, qui l'avait suivi jusque dans cette bicoque où il n'était plus humain...

- Très bien, Gil, mais je t'aurais prévenu.

Doucement, elle s'immergea dans l'eau, poussant une flopée de jurons dus à la froideur de l'onde, s'accrochant au bord de la rivière pour ne pas aussitôt dériver. Elle regarda le courant avec un brin d’effarement. L’exercice semblait déjà difficile, il l'était davantage avec elle qui ignorait nager. Un corps flotte dans l'eau, paraît-il, mais encore eut-il fallut que l'eau ne soit pas si vorace.

Elle lâcha la berge, s’agrippa à un rocher pour avancer d'un pas. L'eau bouillonnait contre sa peau pour ensuite la contourner et glisser vers son maître qui n'était nullement gêné par le courant puissant. Prenant une grande inspiration, elle se plongea dans l'eau tourbillonnante – et fut aussitôt emportée. Le choc contre la corde lui coupa le souffle, mais elle parvint à l’attraper et, peu à peu, revenir à la rive. Se hissant sur l'herbe, elle jeta un regard un peu découragé à la rivière. Ne pas savoir nager n'aller pas l'aider...

Elle se reprit. Elle n'abandonnerait pas pour si peu. C'était un de ses traits de caractère ; elle n'abandonnait jamais, s'accrochait coûte que coûte. Revenant avant la corde, elle s'immergea à nouveau, bien que toujours dubitative.

Et elle recommencerait autant de fois qu'il le faudra.
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Giliwyn SangreLune
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeDim 31 Mai 2020, 21:09

Elle ne savait pas nager.

Par un prodigieux effort de volonté, Gil était parvenu à masquer sa surprise et plus encore, une remarque désespérée : qui donc lui avait refilé une apprentie qui ne savait pas nager ? C’était dingue ! Sidéré, il la regarda entrer dans l’eau parce qu’il le lui avait demandé. On ne pouvait pas tortiller : cette gosse avait un sacré cran. Le soleil joua un bref instant avec la silhouette de la gamine. Non sans satisfaction, il nota qu’elle prenait du muscle, à défaut de prendre du poids. N’empêche. Mince comme elle était, la rivière allait la balayer comme un fétu de paille. Il frémit mais ne bougea pas lorsqu’elle disparut brusquement sous la surface. Il devina le choc de la corde, puis vit une main s’y agripper avec l’énergie du désespoir. Elle remonta. Péniblement, sans cesser de pester, elle se hissa sur la berge et retourna à son point de départ. Revint dans l’eau.

Mais… elle ne savait toujours pas nager.

Gil soupira, cette fois.

- Arrête-toi là, crevette.

C’était reparti pour les surnoms ridicules. Sans effort, l’envoleur s’éloigna de la corde pour se rapprocher de la jeune fille. Il songea qu’une onde plus calme se serait prêtée davantage à une première leçon de nage, mais il n’y avait que cette rivière dans les parages, et puis c’était maintenant que la leçon avait lieu, pas dans six mois.

- On va plutôt commencer par le début, je crois.

Enfer, trois ans seraient-ils suffisants pour lui enseigner tout ce qu’il savait ? Pourtant elle se tenait là, debout dans un élément qu’elle ne maîtrisait pas, à la merci du froid, dans l’attente de la suite. Une telle soif d’apprendre ne cessait pas de l’étonner… ni de lui plaire. A l’instant précis où ses doigts touchèrent le poignet de Neige, Gil réalisa qu’il venait d’ancrer cette nouvelle priorité parmi les siennes : il allait lui apprendre à nager.

- J’ai besoin que tu m’écoutes et que tu fasses ce que je dis. Me regarde pas comme ça, merlan frit ! Penche-toi en avant.

Sa main vint se placer sous le ventre de son élève, puis il attendit à peu près patiemment qu’elle se stabilise à l’horizontal. Lorsque ce fut le cas, il lui demanda de battre des jambes et des bras.

- En même temps, bon sang ! On dirait un chiot en train de se noyer, là… Recommence. Plus doucement. Doucement, j’ai dit.

Il fallait parfois - souvent - décrypter les paroles de Gil, car tantôt elles étaient aussi claires que de l’eau de roche, tantôt son sale caractère bridait sa pédagogie. La leçon fut partagée entre les deux ; lorsqu’il avait le sentiment que Neige ne l’écoutait pas suffisamment, il baissait sa main et lui faisait ainsi boire la tasse. Il se mangea des “tocards” en pleine figure, et d’autres noms d’oiseau au passage, se prit un coup de pied involontaire, fut éclaboussé bon nombre de fois, mais pas une seule fois il ne la lâcha. Elle dut le sentir, ou bien alors ses conseils portaient enfin leurs fruits, car il eut soudain l’impression qu’elle avait un bien meilleur équilibre. Cette remarque fut saluée par une gerbe d’eau qui l’atteignit en pleine figure. C’était, et l’expression prend ici tout son sens, la goutte d’eau qui fit déborder le vase de sa patience. Puisqu’ils se trouvaient dans un endroit moins dangereux que celui de la corde, il lui enfonça la tête sous l’eau comme pour la noyer - il y avait songé au moins une demi-douzaine de fois au cours de l’heure passée. Un sourire sardonique fleurit sur ses lèvres quand il croisa son regard.

- Oups, lâcha-t-il d’un ton provoquant.

Et ça, ce fut l’étincelle qui mit le feu aux poudres. Qui envoya la première éclaboussure ? Ce fut lui qui tira la cheville de la gamine, mais il ne trébucha pas tout seul. Son rire résonna plus d’une fois et c’était celui que peu de personne connaissaient, celui qui vibrait dans l’air et allumait comme un feu dans ses yeux. Ce rire-là partait du coeur. La partie de jeu n’était toutefois pas là uniquement pour l’amusement ; en poussant Neige à jouer, Gil faisait en sorte qu’elle abaisse les défenses instinctives de celui qui affronte ce qu’il ignore. Plus elle serait détendue et moins se mouvoir dans l’eau serait une difficulté. Elle lui semblait déjà plus rapide, plus téméraire aussi. Mais après l’avoir “noyée” pour la vingt-sixième fois, il rompit le combat et sortit de l’eau.

- Non non, dit-il alors qu’elle s’apprêtait à le suivre, et il tendit le bras pour désigner la corde.

Ce serait sa dernière tentative pour cette fois : la nuit tombait, il faisait déjà presque trop sombre pour ce genre de folie. Mais il était persuadé que Neige allait sentir une différence. Elle avait fait connaissance avec la rivière. A présent, il fallait jouer une ultime fois. Non pas contre un maître à l’âme de gamin mais contre une force de la nature.
Ce n’était pas tout à fait pareil.
C’était encore mieux.

Depuis la rive, Gil se déplaçait lentement. Il suivait la jeune fille.
Ne la quittait pas des yeux.
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Neige Mecedora
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeDim 07 Juin 2020, 16:34

- Arrête-toi là, crevette.

Un brin étonnée, elle lui retourna son regard. Qu'allait-il tenter de faire, lui apprendre à nager dans un tel environnement, en quelques heures ? C'était impossible. Elle savait que son ignorance devait l'agacer, ou le consterner, mais si elle ne savait pas nager, elle savait grimper, et ne manquerait pas de le lui démontrer dès qu'elle en aurait l'occasion... S'il lui donnait cette occasion.

Certes, ne pas savoir nager était un handicap, elle l'admettait volontiers. Et puis, elle voulait bien apprendre, là n'était pas le problème. Quand elle voyait des gens évoluer dans l'eau, simplement ou contre un courant fou – ou bien avec ? – elle était envieuse. Comme avec Lou, qu'elle avait vu nager, tandis qu'elle restait sagement sur le bord du fleuve. Mais l'endroit n'était pas très propice pour apprendre les bases de la nage. La rivière tempétueuse ne s'y prêtait pas. C'était indéniable, et même elle le savait. Alors, qu'allait-il tenter de faire, au juste ?

Elle le regarda remonter le courant pour venir jusqu'à elle. Oui, elle voulait apprendre à nager. Et elle apprendrait.

Elle apprenait toujours.

- On va plutôt commencer par le début, je crois.

Elle hocha la tête en réponse. C'était indéniablement évident. Elle attendait cependant de voir comment il allait s'y prendre. La faim d'apprendre la dévorait. Cette même faim qui l'avait menée sur le chemin du Chaos, qui l'avait fait suivre un maître bougon, pour le retrouver parce qu'elle s'y était attachée, qui l'avait fait revenir, progresser dans son coin...

- J’ai besoin que tu m’écoutes et que tu fasses ce que je dis. Me regarde pas comme ça, merlan frit ! Penche-toi en avant.

Roulant des yeux, surtout pour la forme que par réel agacement, elle obéit non sans marmonner un petit « tocard » de circonstance. Toujours pour la forme. Elle fut un peu déstabilisée quand il plaça une main sur son ventre. Presque gênée. Elle ne s'était pas encore habituée aux contacts physiques, coupée du monde et des autres durant trop longtemps ; elle se reprit néanmoins. Elle devait s'y familiariser, d'autant plus avec son maître.

Son corps restait à apprivoiser, y compris pour elle-même, avec l'oiseau qui sommeillait en elle. Cela prendrait son temps.

Doucement, un peu incertaine, elle bascula à l'horizontal. Bien malgré elle, elle se souvenait de sa première tentative avec l'eau, et elle se crispait involontairement. Quelques respirations, et elle se força à se détendre. C'était Gil. Pas un de ses frères, pas son père, pas quelqu'un qui se moquait d'elle et de son bien-être. Elle pouvait avoir confiance. Elle le devait, si elle voulait continuer à progresser.

Ce fut cette idée qui éloigna le souvenir déplaisant.

Sur son injonction, elle entreprit de battre des bras et des jambes, se rata, l'éclaboussa plus d'une fois, l'insulta et se fit insulter, le heurta par inadvertance, manqua de boire la tasse – mais fut toujours soutenue. Elle se détendit peu à peu, jusqu'à que, lassé de se faire éclabousser à répétition, son maître lui enfonça la tête sous l'eau. Se redressant, elle lut son sourire et fronça les sourcils.

- Oups, lâcha-t-il d’un ton provoquant.

En guise de représailles, elle passa la main sur l'eau pour créer une vague qui l’aspergea copieusement, avant de se prendre la pareille. Elle fut tirée sous l'eau, l'attira avec elle, ouvrit bien des fois les yeux sous l'onde troublée par leur bataille, sourit en entendant son rire – loin, si loin de l'image de prédateur qu'il avait donnée dans cette bicoque où l'oiseau avait failli se réveiller. Elle rit aussi, beaucoup, elle qui d'habitude restait impassible, prise par le jeu, un jeu qu'elle n'avait jamais pu partager ou même connaître.

Elle ignora combien de temps cela dura, mais quand il cessa la bataille, la nuit menaçait de tomber sur eux, avec sa voûte voilée de nuages cachant sa lune. Pensant que le jeu était fini et qu'ils allaient enfin se poser, elle voulut le suivre hors de l'eau, se fit refouler. Ses yeux tombèrent sur la corde. Une dernière tentative, donc ? Elle n'avait rien contre ça.

Doucement, elle quitta la rive plus calme pour s'enfoncer dans les méandres de la rivière. Elle se sentait plus apaisée, plus dans son élément, et... plus en phase avec l'eau ? Elle jeta un coup d’œil acéré à son maître, songeant que leur jeu n'avait pas été si spontané et dénué d'intérêt que cela lui avait parut au premier abord.

Elle s'immergea plus profondément ; sentit l'eau la battre, la contourner, toujours plus vive et sauvage. Sentit une différence.

L'eau n'était plus une ennemie. N'était plus une inconnue. Elle avait joué avec, avait fait sa connaissance, l'avait apprivoisée.

Elle fut à nouveau balayée par le courant – évidemment. Mais pendant que l'onde l'envoyait promener contre la corde, elle la sentit moins imperturbable, moins impassible, plus calme. Elle ne savait pas encore correctement nager, elle ne savait pas affronter le courant tumultueux, mais elle n'avait plus de crainte vis-à-vis de l'eau.

Quand elle revint vers la rive pour sortir de l'eau, ses yeux brillaient.
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeMar 09 Juin 2020, 09:55

Les yeux de Gil brillaient autant que ceux de son apprentie lorsqu’il tendit la main pour la tirer hors de l’eau.

- Pas mal pour une crevette qui ne savait pas nager il y a deux heures, railla-t-il en déposant une couverture sur ses épaules.

Elle ne savait toujours pas, pourtant c’était tout comme : une fois l’appréhension envolée, il ne restait que du plaisir. Gil se promit de faire travailler Neige chaque fois qu’ils croiseraient un point d’eau. Son esprit tournait déjà à toute allure, assailli par les idées, les projets, les exercices qu’il allait pouvoir mettre en oeuvre afin de faire d’elle une excellente nageuse. Elle en avait la morphologie et il suffisait de croiser son regard pour en être certain : ce soir, Neige avait fait une rencontre importante.

- Sèche-toi et habille-toi, ajouta-t-il en frottant son poing sur le crâne mouillé de Neige.

Il faisait nuit noire lorsqu’ils reprirent leur route. Ils longèrent la rive jusqu’à ce que l’envoleur juge l’endroit propice à l’installation de leur campement : le terrain était relativement plat, abrité par des arbres, et le gué au bord duquel ils se trouvaient leur permettrait de traverser la rivière avec les chevaux à la lumière du jour. Chacun vaqua à ses tâches dans un silence qui n’avait rien de gênant, car ils étaient l’un et l’autre peu prolixes, surtout le ventre vide. Gil s’occupa du repas : sur des piques improvisées, il fit griller des poissons qu’il avait pêchés en attendant le retour de son élève. Le fond de patates du Domaine termina en purée qu’il agrémenta d’ail, d’oignons et d’herbes. Ils se régalèrent. S’ébattre dans l’eau ouvrait l’appétit, sans compter les trois jours de marche de Neige, dont l’estomac avait dépendu des chasses ; concentrés sur leur assiette, ils mangèrent sans échanger la moindre parole. Attiré par l’odeur du poisson, l’albatros s’était approché un petit peu plus près que d’ordinaire. Gil le regarda claquer du bec. Il préleva un morceau de son poisson et le jeta devant les pattes de l’oiseau. Convaincu par l’engouement de l’animal à fondre sur sa proie, Gil réitéra son geste, mais cette fois-ci il lança le bout de poisson dans l’air : l’oiseau ouvrit le bec, renversa la tête et avala tout rond sa part, sous l’oeil amusé de l’envoleur.

A la fin du repas, Gil laissa Neige rincer la vaisselle dans la rivière tandis qu’il étudiait une carte à la lueur du feu. De temps en temps, il mordait dans sa pomme, sans quitter leur itinéraire des yeux. Il ne vit pas Cîme se rapprocher davantage et sursauta en le découvrant soudain à deux pas de sa jambe. Partager son poisson avait-il jeté les bases d’une confiance nouvelle ? Ou bien était-ce les transformations de Neige qui apaisaient l’oiseau ? Gil reporta son attention sur la carte, mais de temps en temps, il levait les yeux et croisait le regard noir de l’albatros. Il se demanda si leur destination allait convenir à cet animal. La chaleur écrasante du désert n’allait-elle pas le décourager de les suivre ? Avait-il déjà vécu séparément de sa compagne humaine ? Bah, ils verraient bien le moment venu. Il jeta son trognon à la tête de Neige lorsqu’elle réapparut et lui annonça qu’il prenait le premier tour de garde. S’il ne se trompait pas, la gamine allait tomber dans le sommeil en un temps record, épuisée par leurs jeux dans la rivière et comblée par un bon repas. Lui-même somnola tandis que les heures nocturnes s’étiraient doucement, bercé par le murmure de l’eau et la réponse du vent dans les arbres. Bon prince, il ne réveilla Neige qu’un peu avant l’aube. Le sommeil l’écrasait : il s’enroula dans sa couverture et dormit comme un loir pendant trois heures.

Les jours suivants se déroulèrent dans cette gangue sereine de l’habitude, sans forcément parler de routine : au décrassage matinal imposé par Gil s’ajoutèrent de petites séances de nage dans la rivière, généralement ponctuées de taquineries et de jeux qui, en plus de permettre à Neige de progresser, cimentaient le lien entre l’élève et son maître ; ils avançaient assez lentement car tout ou presque était propice à une “leçon de choses”, comme disait Gil - tir à l’arc, lancer de poignard, pêche, chasse… Le soir venu, ils s’affrontaient à la lueur du feu, à mains nues ou bien armés d’un bâton, et l’apprentie se couchait avec une nouvelle collection de bleus. Cela étant, elle gagnait en réflexes et en souplesse. Il la trouvait plus discrète quand elle chassait avec lui et plus vive quand elle s’efforçait de parer ses assauts. Bien sûr, il se contentait d’un hochement de tête pour saluer ses efforts et sa langue acérée ne laissaient passer que des piques teintées d’ironie, mais ces échanges bien particuliers avaient désormais toute leur place dans leur étonnant duo.

Petit à petit, le paysage changea autour d’eux : les arbres feuillus laissèrent place aux conifères, le sol s’inclina, les hameaux se firent plus rares et la température fraîchit. Les montagnes de l’Est étaient là. Guidé par sa carte et ses souvenirs, Gil les mena sur différents sentiers que les chevaux pouvaient emprunter sans mal. Il fallut qu’ils se couvrent, et l’envoleur préféra remettre une chemise sous son tabard plutôt que d’attraper un rhume. Bientôt, la vallée et les immenses plateaux verdoyants s’étalèrent sous leurs yeux, tandis qu’ils continuaient de prendre de la hauteur. Les deux compères devaient tenir leurs montures par la bride et marcher pour franchir d’étroits passages escarpés. Bien des gens auraient regimbé face à un voyage aussi périlleux, mais Gil remarqua que Neige semblait bien plus à son aise ici qu’au pied des montagnes. Alors qu’ils faisaient une halte dans une combe rocheuse pour permettre aux chevaux de se reposer, une idée lui vint. Il entrava Chante-Brume et Thunder et se débarrassa de sa cape, puis il leva les yeux sur la paroi qui s’élançait vers les nuages. Une corniche crevassait la falaise, tout là-haut ; il tendit le bras pour la montrer à Neige.

- On se retrouve à cet endroit. Sois prudente.

Cîme volait déjà au-dessus d’eux en criant comme un encouragement moqueur. Gil attendit que Neige entame son escalade pour s’approche à son tour du mur rocheux et s’élever en quelques mouvements souples.
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Neige Mecedora
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeLun 15 Juin 2020, 16:22

Gil jeta une couverture sur ses épaules et elle s'y enveloppa avec plaisir, profitant de la chaleur du tissu après avoir affronté la rivière glaciale.

- Pas mal pour une crevette qui ne savait pas nager il y a deux heures, railla-t-il.

En réponse, elle se secoua comme un chien mouillé, l'aspergeant de gouttelettes d'eau, un sourire ironique aux lèvres. Son cœur battait néanmoins avec force et tranquillité dans sa poitrine. Elle n'avait plus peur de l'eau, et l'exercice, finalement, lui laissait une impression de plaisir qu'elle goûtait avec joie. Elle se doutait, songea-t-elle en regardant son maître s'affairer, qu'il y aurait d'autres moments où elle aurait à affronter l'eau. Cela faisait partie de son apprentissage, sans aucun doute.

Elle s'en réjouissait d'avance. La rivière, bien que sans pitié, la balayant comme un fétu de paille, lui avait plu. Sa soif d'apprendre avait hâte d'être étanchée.

Ses mèches humides tombant sur son visage, elle se frictionna vivement avant de se rhabiller, prise par la fraîcheur de la nuit tombée. Quand elle sortit de la couverture ayant fait office de serviette, ses cheveux dansaient en boucles folles autour de ses yeux pâles avant de tomber sur ses épaules. Elle les réunit dans son ruban rouge, les laissant un peu lâches.

Ils reprirent la route jusqu'à que Gil s'estimât satisfait du coin trouvé. Silencieuse, et un brin fatiguée, Neige s'occupa des chevaux, brossant les poils pour les débarrasser de la poussière du voyage. Elle prit ensuite le repas préparé par son maître avec plaisir. Cime, qui semblait apprécier davantage l'envoleur de jour en jour, vint quémander à manger sous l’œil attendri de sa maîtresse.

L'oiseau ne la quittait jamais bien longtemps, et le lien qui existait entre eux s'était renforcé encore si cela était possible lorsqu'elle s'était découverte métamorphe. Probablement conscient que le maître de Neige était pour quelque chose dans ces métamorphoses, en bien, il semblait l'estimer davantage qu'aux premiers jours, où, se souvenait-elle, il ne cessait de lui jeter des regards noirs, bien souvent retournés.

C'était une chance, songea-t-elle, que l'envoleur n'ait pas insisté au début de l'apprentissage pour que l'oiseau s'en aille. Elle n'aurait jamais pu le suivre en étant séparée de Cime ; et ce dernier n'aurait de toute façon jamais accepter de la quitter. Bien qu'antipathiques l'un envers l'autre au début, Gil avait accepté sa présence, et elle se doutait que cela n'aurait pas forcément était le cas de tous les maîtres envoleurs. Elle s’estimait donc chanceuse, oui. Leur cohabitation avait fini par payer, si l'albatros se laisser aller à s'approcher de lui, comme elle le remarqua pendant qu'elle nettoyait la vaisselle dans la rivière. Elle en fut même surprise, ne s'attendant pas à un tel rapprochement. C'était sans doute pour le mieux, songea-t-elle.

Elle esquiva le trognon de pomme que lui lança Gil et se contenta de hocher la tête quand il dit prendre le premier tour de garde. Écrasée par la fatigue, elle n'allait certes pas s'en plaindre. S'enroulant dans un couverture, près du foyer, elle tomba vite dans un sommeil sans rêves, dont elle fut tirée avant que les premières lueurs de l'aube n'éclairent leur campement. S'installant sur un rocher, elle s'étira longuement, regarda Cime qui dormait lui-même en haut d'un arbre. Ses brefs mouvements d'ailes montrait cependant qu'il ne dormait que d'un œil, attentif.

Songeuse, elle regarda son maître endormi. Ce n'était que le deuxième cours qu'ils partageaient – si l'on excluait son passage en vitesse dans cette maison où l'oiseau en elle avait manqué se réveiller sous l'influence prédatrice qui habitait alors Gil – mais elle se sentait néanmoins proche de lui ; elle avait vu une de ses facettes, il lui en avait parlé, il l'avait aidée à devenir oiseau et découvrir ce qu'était que cette boule qui l'avait toujours habitée.

Puis le jour vint, et Gil se réveilla.

Les jours qui suivirent se ressemblèrent de façon réconfortante. Elle perfectionna avec lui sa nage, bien qu'ils ressemblaient parfois à deux gamins, son tir à l'arc, son lancer de poignard, apprit à pêcher et à aiguiser sa façon de chasser, et à collectionner les bleus quand, le soir, il décidait qu'il était temps de s'affronter. Chaque moment était vécu intensément et était unique en soi, et elle se sentait inéluctablement progresser, sous l’œil impavide de son albatros, qui profitait, lui, d'être proche d'une rivière pour se sustenter et parfois frôler l'eau de ses pattes dans un envol majestueux.

Le paysage changea peu à peu, et Neige se vit obligée de vêtir une veste par-dessus sa simple chemise. Elle remarqua avec plaisir qu'ils empruntaient le chemin des montagnes. Elle ne cessait de regarder les falaises, avec l'envie brûlante de les escalader. Depuis combien de temps n'avait-elle pas grimpé ? Elle n'aurait su répondre à cette question. Aussi, quand Gil imposa une halte, elle le regarda avec des yeux brillants, l'espoir battant dans sa poitrine. Elle ne fut pas déçue.

- On se retrouve à cet endroit. Sois prudente, fit-il en lui montrant une corniche.

Déjà heureuse, elle effleura les déchirures de la falaise, puis se saisit d'une première prise et s'élança. Elle avançait bien, elle avançait vite, comme si elle n'avait jamais cessé de grimper. Elle retrouvait des gestes familiers, appuyait sur ses jambes pour se saisir d'une prise plus haute, lisant le mur rocheux comme un livre encore jamais ouvert. Ce n'était pas les Dentelles Vives, aussi, elle devait se tracer un nouveau chemin sur cette montagne inconnue.

Elle sentait la pierre râpeuse sous ses doigts, les niches sous la pointe de ses pieds, et progressait avec régularité, s'arrêtant parfois pour hésiter entre deux voies, jonglant entre celles difficiles, qui mettaient ses muscles à l’épreuve, et d'autres plus simples, juste pour le plaisir de grimper.

Neige ne fit qu'à peine attention à son maître se lançant à son tour dans l'escalade, concentrée sur la sienne. Elle finit par arriver à la corniche, un grand sourire heureux aux lèvres, et s'y assit, jambes dans le vide, sa main encore posée sur la falaise.
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeLun 15 Juin 2020, 22:28

Cette escalade fut une belle leçon.

Pour Gil.

Alors que, par habitude sans doute, il avait déjà des remarques acerbes sur le bout de la langue, prêtes à cueillir son élève au vol, le maître musela toute raillerie et ne fut plus qu’attention. Il ne perdait pas de vue la corniche ni même le chemin qu’il suivait, mais son regard ne se détacha pas de Neige un seul instant. Il admira la fluidité de ses gestes, apprécia la justesse de ses prises, approuva son itinéraire le long de la paroi verticale ; le vent semblait n’avoir aucune emprise sur elle, pas plus que le vide qui, pourtant, avait tendance à se changer en un dangereux appel silencieux. Non, Neige ne regardait pas en bas, c’était vers le ciel qu’elle s’élevait, et Gil doutait franchement que quiconque pût seulement envisager de la freiner dans ce formidable élan qui la poussait toujours plus haut. Lui-même n’en fit rien. Il évoluait un peu en-dessous d’elle, prêt à réagir au moindre faux mouvement, à la moindre faiblesse, et cependant certain qu’il n’aurait pas à le faire. Cette fille était faite pour grimper - non, pour voler. De surprise, l’envoleur se figea un bref instant, les yeux fixés sur Neige : elle ne s’occupait pas de lui, et ses longs cheveux blancs dansaient dans son dos au gré de ses mouvements et de ceux du vent. Il y eut une seconde durant laquelle il crut voir non pas des mèches immaculées mais des ailes. Illusion ? Fatigue ? Incapable de trancher, Gil reprit son ascension. Il rattrapa son élève au moment où elle se hissait souplement sur la corniche et s’installa à côté d’elle.

Mais il ne dit rien. Parce que le paysage qui s’offrait à eux ne méritait pas qu’on le gâche d’une parole hasardeuse, parce que l’exploit de Neige valait bien un silence respectueux, et parce que ce moment n’appartenait qu’à eux. Unique, il s’éloignait déjà, laissant leur place à d’autres instants qui, évidemment différents, n’auraient plus jamais cette force. Immenses, les plateaux verdoyants clairsemés de champs de céréales s’étendaient jusqu’à heurter le Pollimage, véritable ligne bleue qui ne s’esquissait qu’aux yeux des grimpeurs les plus audacieux. Assis à cette hauteur, l’on croyait avoir le monde à ses pieds ; c’était vrai, dans un sens. Rêveur, Gil se demanda quel effet cela pouvait-il bien faire que de s’élancer depuis cette corniche et de déplier ses ailes pour se laisser porter par le jeu des vents. C’était une question qu’il ne s’était jamais posée auparavant, lui qui avait déjà gravi les Dentelles Vives et qui s’était attaqué à la traversée des hautes montagnes du Poll. Encore une fois, il s’étonna de ce que la présence de Neige pouvait déclencher en lui comme prise de conscience. Il se posait des questions qui ne lui auraient jamais traversé l’esprit avant de rencontrer cette gamine. Comment pouvait-elle se montrer si pataude - à ses yeux, du moins - en pleine forêt, si novice dans l’eau, et grimper de cette façon ? C’était inconcevable, mais moins qu’une fille qui peut devenir un oiseau. Alors, il admit volontiers cette réalité.

Puis vint le doute. Que pouvait-il lui enseigner dans cet endroit ? Elle savait grimper comme si elle avait appris à le faire avant même de savoir marcher. Face à un Faël, il savait déjà sur qui se porterait son pari. Finalement, ne préférait-il pas s’échiner à lui apprendre les bases de la natation ? N’était-ce pas plus confortable de la taquiner à tout bout de champ ? De la reprendre sur une position, d’en corriger les défauts, d’exiger la perfection ? Soudain attentif à la question, Gil s’obligea à changer d’angle de vue. Ce n’était pas plus confortable, c’était… rassurant. D’avoir non pas plus d’expérience, mais des choses à transmettre, un savoir qu’il espérait voir se déployer en son élève, faire sens, devenir sien. Que lui restait-il, dans cette ascension ? L’accompagnement ? C’était à peine si Neige avait remarqué sa présence. Prévention ? Quand bien même aurait-elle raté une prise, s’il n’avait pas été là pour freiner sa chute, l’albatros qui existait en elle n’aurait-il pas pris son envol pour leur sauver la vie ? Peut-être bien qu’en fait, tu vieillis, mon grand… mais non. Sans écarter cette réalité-là, Gil se dit qu’il s’éloignait un peu du sujet. Il ne s’agissait pas de lui mais d’elle. La fille au yeux rêveurs assise à côté de lui. Et soudain, ce fut très clair.

Limpide.

- Il y a des chemins qui n’ont pas de fin, dit-il, et il sursauta en réalisant qu’il avait parlé à voix haute. Alors, il décida de poursuivre, de préciser sa pensée. L’élève qui devient maître ne cesse jamais d’apprendre. Le maître peut apprendre de son élève. Acquérir un savoir, le transmettre, vider un peu son verre et le remplir d’un nouveau savoir… au fond, ça ne s’arrête jamais. Et c’est tant mieux.

C’était lui qui guidait Neige dans cette formation longue et périlleuse, et le temps qui passait fortifiait cette idée de façon tout à fait naturelle. Mais, parfois, il pouvait aussi se placer dans son sillage et apprécier de la suivre, tout simplement. Comme à présent. Le plaisir de cette envolée à ses côtés avait façonné un souvenir précieux qui, il le savait, ne s’effacerait jamais de sa mémoire, et le sourire qu’il échangea avec la jeune fille témoignait de son émotion. Mais il avait brisé le silence en parlant, et avec lui, la bulle étrange dans laquelle ils s’étaient l’un et l’autre enfermés. Déjà la malice était de retour dans les yeux vairons de Gil, et c’est avec nonchalance qu’il bascula en arrière, en appui sur les coudes, pour récupérer son fidèle costume de mentor un peu pénible sur les bords.

- Si tu pouvais te déplacer sur le sol avec autant de grâce que sur cette paroi rocheuse, on gagnerait un temps fou !

Adoucie par son sourire, la pique était de toute façon décrédibilisée par la fierté qui se lisait dans ses yeux. Bah, il s’en moquait bien, après tout. En fait, il avait d’autres idées en tête. Décidant soudain que cette pause en altitude était l’occasion idéale pour aborder certains sujets, il se lança.

- Que sais-tu de ce qui t’attend par la suite ? demanda-t-il, sérieusement cette fois-ci. Des étapes de ta formation par exemple ? Et de ce qui pourrait être ton quotidien, après ?

Il l’observait, la tête penchée sur le côté, toujours en appui sur les coudes ; il était curieux de savoir comment Neige envisageait son lendemain.

Si toutefois elle l’envisageait.
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeMer 17 Juin 2020, 19:09

Neige ne remarqua pas le silence inhabituel de son maître.

Elle grimpait.

C'était tout ce qui importait.

La roche lui avait manquée ; son contact rude et rêche, parfois chauffé par le soleil, parfois frais comme une rivière. Le vent tantôt doux, tantôt fort, qui cherchait à la plaquer à la paroi ou au contraire à l'en éloigner, sans qu'elle n'y prêtât attention. Le vide sous ses pieds, qui n'avait jamais eu aucune importance et qui était désormais dénué de sens, puisqu'elle était oiseau. Elle ne pouvait pas tomber – seulement monter de plus en plus haut, dans l'espoir bref d'effleurer le ciel et s'y perdre. S'envoler et ne jamais redescendre sur ce monde fait de terre et d'herbe.

Son cœur battait avec régularité, au rythme de sa montée tranquille. Elle se saisissait des prises avec assurance, certaine qu'elles ne se déroberaient pas sous ses doigts, grimpant comme si elle avait quitté la montagne seulement la veille et pas des années auparavant, la retrouvant pour mieux l'enlacer. La brise rosissait ses joues et un grand sourire, invisible aux yeux de Gil, se dessinait sur son visage.

Le sourire perdura quand, assise sur la corniche aux côtés de son maître, elle admira le spectacle qui se découvrait devant elle. Unique, il différait de celui qu'elle avait l'habitude d'observer depuis les Dentelles Vives. Emplissant ses poumons de l'air frais des hauteurs, elle s'imagina s'élancer de là pour s'envoler – et l'idée l'enivra. Mais pour cela, songea-t-elle, elle devait apprendre à maîtriser l'oiseau en elle, pour qu'il ne lui échappe pas. Et accessoirement, garder ses vêtements à chaque transformation, si c'était possible. Un long travail en perspective, mais dans lequel elle serait aidée par Cime – qui continuait à planer, là-haut, comme pour leur laisser un peu d'intimité après cette escalade.

- Il y a des chemins qui n’ont pas de fin. L’élève qui devient maître ne cesse jamais d’apprendre. Le maître peut apprendre de son élève. Acquérir un savoir, le transmettre, vider un peu son verre et le remplir d’un nouveau savoir… au fond, ça ne s’arrête jamais. Et c’est tant mieux.


La jeune femme, surprise, le regarda avec attention. C'était une façon comme une autre de célébrer ce qui aux yeux de beaucoup devait relever de l'exploit, et ce qui pour elle n'était que retrouvailles avec son adolescence. Elle lui retourna son sourire, rangeant ses paroles dans un coin de son esprit pour y réfléchir à tête reposée – quand elle serait moins enivrée par les hauteurs et son escalade passée.

- Si tu pouvais te déplacer sur le sol avec autant de grâce que sur cette paroi rocheuse, on gagnerait un temps fou !

Neige éclata de rire pour seule réponse. Elle était faite pour grimper, et n'atteindrait probablement jamais le même niveau sur le sol, mais cela ne la dérangeait pas outre-mesure tant qu'elle s'améliorait – et, sous la houlette de Gil, elle était sûre de s'améliorer. De plus, la fierté brillant dans les yeux de son maître lui mettait du baume au cœur. Rien que pour cela, elle était heureuse d'avoir grimpé jusqu'ici. Pour un simple sourire.

Elle était peut-être novice quant à ce qui concernait la nage, mais elle venait de lui démontrer sans prendre de pincettes qu'elle avait ses propres points forts.

Les questions qui vinrent, et son air sérieux, la prirent cependant par surprise.

- Que sais-tu de ce qui t’attend par la suite ? Des étapes de ta formation par exemple ? Et de ce qui pourrait être ton quotidien, après ?

Son regard retourna vers le bas et le paysage verdoyant. Ce qu'elle attendait ? Elle ne s'était jamais posé la question. Elle était trop rêveuse – elle se rappelait à peine de pourquoi elle avait décidé de devenir Envoleuse. Pour être libre de ses mouvements et se débrouiller seule, se souvint-elle. Pour cette curieuse notion qu'était la liberté.

- Je n'y ai jamais réfléchi, avoua-t-elle.

Pause.

- Je ne passe pas vraiment du temps au Domaine, j'ignore donc ce qui m'attend. Une évaluation de mes capacités, je suppose. J'ai vu ta greffe, je gage donc que je pourrais moi aussi obtenir quelque chose de semblable – peut-être. Quant à mon quotidien ensuite...

Elle prit le temps de réfléchir. Jusqu'alors, cela avait été d'être libre, oui. Mais maintenant ? Après ses rencontres avec Liana, Lou, ses liens avec Gil, la découverte qu'elle était un oiseau ?

- Je pense que j'aimerais découvrir pourquoi et comment je peux devenir un animal. Savoir s'il y a d'autres gens comme moi. Faire ce que je veux, surtout. Et puis, explorer le monde. Avant, il ne m'intéressait pas vraiment, mais à force de rencontrer des personnes, je ne sais pas, il me paraît plus attirant.

Elle le regarda.

- Pourquoi ces questions ? Et toi, qu'est-ce que tu désirais faire à la fin de ta propre formation ?
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeSam 20 Juin 2020, 21:04

- Pourquoi ? Parce que tu es rarement aussi... accessible, pour ne pas dire "ouverte", que maintenant. C'est comme si cette escalade avait déverrouillé quelque chose en toi. Ou en moi, pour ce que j'en sais.

(Il grogne)

- Et puis je me demande bien pourquoi je devrais justifier mes questions alors que je suis ton maître, face de Raï.

(Il s'allonge complètement sur le dos et croise les mains derrière la nuque.)

- La greffe se mérite. Tu devras d'abord faire tes preuves à l'occasion d'un examen particulièrement difficile. Si tu survis à ce dernier et si ta réussite est reconnue, ce sera à toi de solliciter la greffe auprès d'un Mentaï. Il s'inspirera de la requête que tu formuleras. J'me suis dit que tu devais le savoir, pour commencer à y penser, un peu.

(Quelques secondes filent. Deviennent des minutes.)

- A la fin de ma formation, je voulais venger ma mère en tuant le plus possible de marchombres.
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeMar 23 Juin 2020, 18:38

Ouvert quelque chose, hein ? Mais il était vrai que l'escalade qu'ils avaient vécu à deux lui avair fait un bien fou. Cela faisait longtemps qu'elle en rêvait.

Elle laissa échapper un rire amusé à sa réplique suivante.

- Cela ne te fera pas de mal de te justifier de temps en temps, tocard.

Elle écouta la suite avec attention.

- Penses-tu que je réussirais cet examen ? interrogea-t-elle avec sincérité.

Elle essaya d'imaginer quelle greffe elle pourrait demander, mais aucune idée ne lui vint. Elle était déjà un oiseau, que pouvait-on lui apporter de plus extraordinaire ? Cela méritait cependant réflexion.

- Tu veux toujours tuer des marchombres ?

Bref silence.

- Tu sais, je suis partie de chez moi parce qu'on voulait me marier de force. J'ai fini comme serveuse à Al-Chen, et je ne voulais pas de cette existence. Cela aurait pu être un marchombre plutôt qu'une mercenaire, au final. C'est du moins ce que je pense.
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeJeu 25 Juin 2020, 09:18

Me justifier ? Et puis quoi, encore ?!

Grognement.

- Si je te présente à un examen, quel qu'il soit, c'est que je t'estime capable de te débrouiller. Mais on a encore un long chemin à faire, toi et moi, avant que cette occasion se présente.

Je... non. Enfin, plus pour ce genre de raison, en tout cas. Et puis tu sais, je n'ai jamais été un "fils du Chaos" modèle. Sans doute parce que, comme toi, j'aurais tout aussi bien pu atterrir chez les Marchombres. Tu as raison, ça ne change pas grand chose.

Et ça chante tout.

Je t'apprends ce que je sais pour que tu n'aies plus à fuir ni à subir la contrainte. Pour que tu sois libre. Toutefois, le Chaos rassemble des gens qui servent une cause, celle de la renaissance par la destruction. Si tu deviens Envoleuse, tu devras rendre des comptes et traquer des Marchombres. De ce point de vue, mieux vaut être le chasseur que la proie, non ?
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeVen 26 Juin 2020, 16:58

Sourire en coin en réponse à son grognement.

- Je te fais confiance, alors.

C'est vrai que je préfère être le prédateur que la proie. Devenir un oiseau me relègue plus au rang de proie qu'autre chose, pour l'instant. D'ailleurs, tu connais des gens comme moi ? Cela m'étonnerait d'être la seule à pouvoir me changer ainsi.

Si je dois traquer des marchombres, je le ferai. J'en ai rencontré une, après notre premier cours. Je me vois mal la traquer plus tard, mais si ce sont des gens que je ne connais pas, pourquoi pas.

Cependant, est-ce qu'on est toujours vraiment libre si on doit rendre des comptes ?
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeDim 28 Juin 2020, 12:03

- Je te fais confiance alors.

Gil hocha distraitement la tête, les yeux perdus sur le plafond rocheux de la corniche. Neige n’avait pas besoin d’exprimer ce qu’il ressentait désormais de manière évidente. En revanche, la question qu’elle lui posa ensuite lui fit froncer les sourcils. Oui, il connaissait quelqu’un mais… Coup d’oeil en direction de la jeune fille. Après le tournant que venait de prendre leur conversation, devait-il lui parler d’Erwan ? Certes, il pouvait mentir par omission et ne pas mentionner que ce dernier était un marchombre ; d’un autre côté, s’il évoquait une personne capable de se transformer en animal, Neige n’allait-elle pas tenter de la trouver ? Il finit par se rasseoir, et suivit pensivement le vol de Cime du regard. C’était quelque chose qu’il ne pouvait pas enseigner à son élève. A part l’encourager à accepter cette partie d’elle, et la soutenir quoi qu’il arrive, il n’était pas en mesure de répondre à ses questions dans ce domaine. C’était sa limite et il en avait pleinement conscience.

- Si je dois traquer des marchombres, je le ferai, poursuivit Neige sans se douter des noeuds qu’elle créait dans l’esprit de son maître.

Gil fit gonfler sa joue en appuyant le bout de sa langue ; pour avoir déjà croisé Erwan à plusieurs reprises, il savait pertinemment que, face à lui, son apprentie n’avait aucune chance. Il savait aussi que le marchombre était un homme de principes, même si cela lui coûtait franchement de l’admettre. Au fond, Neige risquait-elle véritablement quelque chose ? Elle continuait de babiller, ce qui était étrange, mais pas désagréable, et le cheminement de sa pensée intéressait l’envoleur. Un creux de sourire se forma dans sa joue.

- Il suffit de ne pas confondre libre arbitre et responsabilité. Les seuls principes auxquels tu te dois de te tenir, ce sont les tiens. La seule personne à qui tu dois véritablement rendre compte, c’est toi. C’est… ce que je viens d’apprendre, en me remettant de mon épisode… hum, bestial.

Il se gratta la joue. Il ne s’était pas rasé depuis quelques jours et un chaume foncé couvrait sa figure, lui donnant l’air dangereux.

- Je n’ai jamais aimé suivre les directives du Domaine, et encore moins celles de l’Ordre. Des missions, j’en ai effectué mais moins qu’escompté par nos supérieurs. Et si tu regardes bien, tu verras que je ne suis pas le seul : c’est le pendant de notre organisation, sa faiblesse autant que sa force : nous agissons d’abord pour nous-mêmes. Je crois que c’est en cela que nous sommes différents des Marchombres.

Il rit, se rappelant soudain quelque chose :

- Il y a quelques années, ma tête était mise à prix dans la moitié de l’empire et j’étais devenu une menace pour le Chaos. Je ne te raconte pas comment j’ai dû faire de la discrétion une science…

Le silence revint, paisible ; Gil prit la décision de confier à Neige ce qu’il savait à propos d’Erwan. Mais pas tout de suite. Ils étaient au milieu de quelque chose, non ?

- On continue ? lança-t-il en se levant. Le dernier qui atteint le sommet…

Il se tut brusquement, soudain réticent à l’idée de défier une grimpeuse de la trempe de Neige.



[Très court, mais j'aime l'idée de terminer sur Gil qui se fait avoir par sa propre connerie xD]
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeLun 29 Juin 2020, 00:51

Un brin curieuse, jambes battant dans le vide, Neige attendit qu'il répondît à sa question, en vain. Soit il ne connaissait personne comme elle, soit il ne voulait pas en parler. Soit. Elle trouverait bien par elle-même, s'il le fallait. Elle ne pouvait dépendre de lui pour cela. Elle ne pouvait dépendre de lui pour sa métamorphose, parce que ce n'était pas quelque chose qu'il vivait. Il ne pouvait que l'encourager.

Comment trouver des gens qui se changeaient en animaux, cependant ? Levant la tête vers le ciel clair, elle se mordilla la lèvre. En y repensant, la boule dans son ventre s'était agitée aux abords de Liana. Est-ce que... Cela paraissait improbable, mais si auprès de Lou comme auprès de bien d'autres personnes il ne s'était rien passé, et que cela s'était agité près de la marchombre et de Gil devenu une Bête, peut-être que...

Les yeux brillant, elle se promit de prendre contact avec la marchombre. Si elle avait tort, eh bien, tant pis. Cela valait le coup d'essayer. Si elle avait raison...

Mais déjà ses pensées revenaient à ce fameux examen. Elle se demandait en quoi il consisterait,et si elle le réussirait. Distraitement, elle repensa à la greffe de Gil. C'est vrai qu'avoir quelque chose de semblable serait génial... Mais il fallait que cela vienne d'elle. Que pouvait-elle souhaiter ?

Ma foi, songea-t-elle, inconsciente du propre chemin de pensées de son maître, j'ai encore du chemin à faire avant ça. J'ai le temps d'y réfléchir.

- Il suffit de ne pas confondre libre arbitre et responsabilité. Les seuls principes auxquels tu te dois de te tenir, ce sont les tiens. La seule personne à qui tu dois véritablement rendre compte, c’est toi. C’est… ce que je viens d’apprendre, en me remettant de mon épisode… hum, bestial.

Neige hocha la tête, pensive. Elle écouta néanmoins avec attention la suite des paroles de son maître. La différence entre marchombres et envoleurs était quelque chose qui l'intéressait de près, depuis qu'elle avait rencontré Liana. Au fond, elle-même ne se voyait pas effectuer non plus beaucoup de missions pour le Domaine. Une fois déployées les ailes de sa liberté, elle aurait davantage envie de parcourir Gwendalavir et rencontrer des gens que s'attarder à tuer des marchombres « parce qu'il le fallait ». Elle serait probablement un cauchemar pour ses supérieurs, et ne pouvait que s'en réjouir ; être commandée comme un bon petit soldat, ce n'était pas son genre.

Elle avait toujours fait un peu tache, alors, un peu plus, un peu moins...

- Il y a quelques années, ma tête était mise à prix dans la moitié de l’empire et j’étais devenu une menace pour le Chaos. Je ne te raconte pas comment j’ai dû faire de la discrétion une science…

Neige sourit.

- Et comment tu as réussi cet exploit de te faire détester par tout le monde ? nargua-t-elle.

Il était peu dire que si on ne le connaissait pas, Gil était vraiment détestable. Elle-même l'avait expérimenté au début de leur relation. Ils avaient évolué, depuis, pensa-t-elle. Sacrément évolués, même. Elle en était plutôt heureuse.

- On continue ? lança Gil en se levant. Le dernier qui atteint le sommet…

Un peu commun sourire sardonique se dessina sur les lèvres de Neige en sentant son hésitation. Il n'avait aucune idée de ce dans quoi il venait de se plonger, songea-t-elle.

- Est une face de Raï ? C'est ce que tu voulais dire ? Ça me va. À plus, future face de Raï.

Sans daigner l'attendre, elle sauta sur ses pieds et se dirigea vers la paroi rocheuse, empoignant deux prises. La suite ne fut que banalité, tant elle grimpait avec aisance et rapidité. Profitant néanmoins de l’ascension, c'est avec plaisir et un grand sourire qu'elle parvint au sommet et se laissa tomber assise sur la cime de la falaise.
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeLun 29 Juin 2020, 07:58

Mouché en beauté, Gil éclata de rire (pour la deuxième fois depuis qu’ils étaient arrivés ici) et regarda Neige s’envoler. C’était l’impression qu’elle donnait alors qu’elle s’élançait à nouveau dans l’escalade de la paroi rocheuse dans des gestes sûrs. Il secoua la tête, s’étira en songeant que ces instants volés au temps dans cette corniche étaient désormais gravés dans sa mémoire, puis reprit son ascension - et se fit un devoir de prouver à sa jeune élève qu’il n’était pas si nul que ça. Ensemble, ils arrivèrent au sommet. De la neige existait sur les monts les plus hauts mais ici, seul l’air était glacé : il donnait l’impression que des doigts invisibles s’étaient resserrés autour de leurs poumons et un nuage blanc se formait au bord de leurs lèvres lorsqu’ils expiraient. Le vent était vif, il cherchait à les précipiter au bas de leur perchoir et, si l’on oubliait toute prudence, il lui serait facile d’y parvenir. La chute serait indéniablement mortelle à cette altitude.

Pourtant Gil resta debout au bord du vide, défiant les bourrasques avec une volonté d’acier. Il ne donnait toutefois pas l’impression de lutter. Tranquille, les bras le long du corps, il oscillait sur ses pieds, se laissait presque happer puis ployait les genoux et rétablissait son équilibre. Equilibre. Il y avait de l’importance à accorder à ce mot et à ce qu’il signifiait. Garder son équilibre ici relevait de l’inconscience, voire de l’impossibilité mais l’envoleur semblait ne pas douter de lui. Certains auraient pu y voir de la suffisance, d’autres une folie monumentale, d’autres encore, une tendance suicidaire, et peut-être y avait-il un petit peu de vrai dans tout cela, car après tout, Giliwyn SangreLune n’était pas l’homme le plus raisonnable de ce monde ! Néanmoins, ce qu’il réalisait là était au contraire mûrement pensé, réfléchi ; c’était une danse qu’il avait apprise aux côtés de Seren puis qu’il avait perfectionnée à sa manière et en solitaire. Un pas de deux avec le vent qu’aujourd’hui, il enseignait à Neige.

- On dirait parfois l’eau d’une rivière, dit-il sans préciser de quoi il parlait.

Neige et lui ne s’étaient pas “accordés” quelques minutes plus tôt ? Le lien qui était né entre eux vibrait si fort qu’il s’attendait presque à le voir s’il se concentrait suffisamment. C’est toutefois l’horizon qu’il fixait de ses yeux dépareillés, concentré sur un point invisible - et tout ce qui l’entourait. Il percevait Cime qui dansait de la même manière que lui. Il devinait la curiosité, le questionnement, l’envie de Neige assise près de lui. Il tendit les bras, offrant soudain une prise au vent qui, avec fourberie, tenta de s’engouffrer dans cette brèche apparente. Se heurta à un mur. Guère plus qu’il ne faisait trembler la montagne, il ne pouvait déraciner cet homme.

- Les mêmes courants, la même malice, les mêmes dangers… Ici toutefois, pas besoin de nager. Debout, mini tocarde.

Sourire amusé.

- Viens te mesurer au vent. C’est dans tes cordes, mais reste légèrement derrière moi.

Il ne tenait pas à ce qu’elle bascule par inadvertance. Il aurait pu l’encorder mais ce serait une entrave à sa liberté et une insulte envers ses capacités : sans savoir nager, elle avait su se débrouiller dans la rivière. Ici, on était dans son élément, c’était aussi évident que le nez au milieu de la figure et Gil ne commettrait plus l’erreur de la sous-estimer. Il attendit qu’elle se lève pour continuer.

- Trouve ton équilibre en percevant la force des courants. Ne te laisse pas étourdir par les promesses du vent ni flatter par ses caresses : reste à l’écoute de ton corps car c’est lui que tu protèges. Et ne m’oblige pas à sauter dans le vide pour te récupérer.

Vaine boutade ? Nul n’est à l’abri du danger. Pourtant Gil croyait fermement à ce qu’il venait de dire. Si, en dépit de leurs précautions, elle venait à tomber, il plongerait.

Sans hésiter.



*


- Je connais quelqu’un comme toi.

Discussion de haut vol.
Entre deux andouilles qui gesticulent face au vent.
Au sommet d’une montagne.
Comme si tout était parfaitement normal.

- Il s’appelle Erwan Narcos.

Battement de cils.
Battement de coeurs.
Vent puissant.
La grande andouille n’a pas fini.

- C’est un marchombre.

Voilà.
C’est dit.



*


Et puis au fond, quelle importance ? Gil se demandait si cette capacité à se changer en animal ne gommait finalement pas des différences de principes et de mode de vie. Peut-être qu’Erwan et Neige se ressemblaient davantage que Neige et lui-même. Peut-être qu’il se posait trop de questions. Il avait décidé de lui confier cette information et de la laisser choisir qu’en faire. Il ne pouvait pas faire davantage et, si la perspective de s’en remettre à son vieux rival le faisait grimacer, il espérait avoir pris la bonne décision. Seul l’avenir le dirait ! De retour sur le plancher des vaches, les deux grimpeurs s’étirèrent puis se restaurèrent avant de reprendre la route en tenant leur monture par la bride.

Il s’en fallut encore de deux jours pour qu’ils achèvent leur traversée des montagnes de l’Est, et ce fut pour déboucher dans une vaste forêt plantée d’arbres bien différents de ceux qu’ils avaient l’habitude de croiser en Gwendalavir. Gil l’avait déjà traversée bien des années plus tôt mais cela ne l’empêcha pas de considérer avec curiosité les épais buissons et taillis qui les entouraient. Se frayer un chemin était complexe et demandait une patience infinie qu’il était loin de posséder. Mais alors qu’il aurait dû s’agacer, l’envoleur conserva son calme, et ce n’était pas entièrement dû aux changements dont son humanité retrouvée lui faisait jouir : il guida Neige dans ce fouillis végétal jusqu’à atteindre une sorte de cabane en bois. Il devina plus qu’il ne vit la tension de Neige quand ils aperçurent deux chevaux à l’entrave près de la modeste habitation et lui lança un regard destiné à approuver sa méfiance, mais aussi à l’apaiser ; il connaissait les gens qui se trouvaient là.

Ils attachèrent Chante-Brume et Thunder près des autres chevaux puis Gil s’approcha de la porte qu’il tapota du bout des doigts. L’huis grinça en pivotant sur ses gonds, dévoilant un petit homme au crâne parfaitement chauve et aux yeux d’un bleu incroyablement turquoise. Sans sourire, il se décala pour laisser passer les deux visiteurs, puis referma la porte dans leur dos. La pièce était plus spacieuse qu’elle en donnait l’impression depuis l’extérieur. Deux lits superposés occupaient le coin droit, une table le centre, un poêle le coin gauche. Quelques chaises, un vaisselier, et sur le mur, quelques étagères poussiéreuses où quelques livres se battaient en duel. Il y avait deux tasses posées sur la table, ainsi qu’une théière et une brioche aux raisins entamée. Un deuxième homme était attablé : plus grand que l’homme chauve, mais moins que Gil, il était plutôt costaud, tout en muscles, et sa peau, ses cheveux et ses yeux avaient la couleur de l’ébène.

- T’en as mis, du temps, souffla le chauve à l’attention de Gil. Enfin, t’es plus en retard que d’habitude.
- On s’est arrêté un moment près d’une rivière.


Gil laissa glisser son sac à terre puis se tourna vers Neige.

- Lui c’est Feu-Gris, dit-il en désignant le chauve, et lui c’est son élève, Naol.
- Salut, Neige. Du thé ?


Neige apprendrait que Feu-Gris ne jurait que par le thé, qu’il préparait lui-même et qui était toujours d’une qualité fabuleuse. Elle apprendrait aussi qu’il était un Mentaï et qu’il enseignait aussi bien l’art du combat et de l’assassinat à Naol, que celui du Dessin. Gil et lui se connaissaient depuis de nombreuses années ; Feu-Gris était, en dehors de Syles et de Kaünis, le seul membre du Domaine avec qui Gil se soit jamais sincèrement lié. Le contraste était pourtant étonnant entre les deux hommes, par la taille, l’âge et par l’attitude : proche de la soixantaine, Feu-Gris bavardait sans s’interrompre ni paraître s’agacer que Gil réponde uniquement par quelques grognements sourds. Mais l’on pouvait dire aussi que Naol et Neige s’opposaient sur bien des points, ne serait-ce que parce que l’un était noir comme la nuit et l’autre blanche comme la lune. Pas si opposés que cela, alors ?

- Naol et toi avez à peu près le même niveau, déclara Feu-Gris alors qu’ils partageaient thé et gâteau autour de la table. Giliwyn et moi avons donc eu l’idée de laisser nos routes se croiser un moment et de vous entraîner un peu tous les deux. C’est dans la diversité des exercices et des partenaires que les progrès se font. Encore un peu de thé, Neige ?




[Feu-Gris et Naol sont des pnj, libre à toi de les manipuler à ta guise Wink]
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeSam 04 Juil 2020, 19:15

Ce fut dans un ensemble harmonieux qu'ils atteignirent le sommet, et Neige songea que cette harmonie n'était pas réservée qu'aux marchombres. Il y avait quelque chose de spécial à atteindre la cime dans les mêmes mouvements que son maître. Son rire résonnait encore à ses oreilles, lui arrachant un sourire vague. Il était si différent de la première fois où elle l'avait rencontré – mais n'avait-elle pas changé, elle aussi ? Elle était plus sûre d'elle, un peu moins rêveuse, plus alerte. Elle était façonnée et se façonnait pour appartenir à une faction aux idées auxquelles elle n’adhérait pas forcément.

Secouant la tête, elle souffla dans l'air givré, regarda la brume blanche qui flotta hors de ses lèvres. Elle s'était rarement aventurée aussi haut dans les Dentelles Vives, mais retrouvait un plaisir passé – celui de toucher le faîte du monde. Elle s'étira longuement, ses doigts tendus le plus haut possible, comme si elle pouvait effleurer le ciel, peu soucieuse du gouffre à ses pieds. N'était-elle pas oiseau ? La chute ne voulait rien dire pour elle.

Son regard curieux revint sur Gil, qui, debout au bord du vide, semblait se jouer du vent comme il s'était joué des courants. Dans une danse défiant toute logique, il oscillait, glissait, se rétablissait sans que la moindre hésitation n'entache ses mouvements. Une danse mortelle, mais qu'il faisait sienne avec assurance. Cela fit briller un peu d'admiration dans les yeux clairs de Neige. Elle-même ne s'était jamais livrée à ce jeu, préférant sentir les bourrasques du vent alors qu'elle était allongée sur les cimes des Dentelles Vives, cheveux ébouriffés, envieuse de son albatros qui jouait avec parce qu'il était né pour. Il semblerait que l'Homme aussi pouvait se risquer au jeu du vent. Cela ne l'étonnait guère, au final. Lui vint cependant l'envie d'essayer, elle aussi, de se jouer des courants d'air et de la pesanteur.

- On dirait parfois l’eau d’une rivière
, dit-il.

Elle hocha la tête, entendant pleinement ce qu'il voulait lui dire à travers ces mots que d'aucuns auraient trouvés abscons. Les courants d'air et d'eau se ressembleraient-ils donc ? Avait-elle plus de chance de triompher du vent que de la rivière, grimpeuse innée plutôt que nageuse ? Après tout, le vent ne la gênait pas lors de ses escalades. Il avait été au début un fardeau, qui tentait de l'arracher de la falaise, jusqu'à qu'elle s'en fasse un ami avec qui jouer.

- Les mêmes courants, la même malice, les mêmes dangers… Ici toutefois, pas besoin de nager. Debout, mini tocarde.

Bref sourire. Un mot qu'ils se partageaient.

- Viens te mesurer au vent. C’est dans tes cordes, mais reste légèrement derrière moi.


Obéissant, elle se leva et glissa derrière lui, ouvrant les bras à son tour. La première bourrasque la fit vaciller, mais elle tint bon. La seconde fut plus enjôleuse, joueuse, dérivant le long de son torse pour repartir derrière elle en brusque coup de vent.

- Trouve ton équilibre en percevant la force des courants. Ne te laisse pas étourdir par les promesses du vent ni flatter par ses caresses : reste à l’écoute de ton corps car c’est lui que tu protèges. Et ne m’oblige pas à sauter dans le vide pour te récupérer.


Attentive à ses mots, elle s'autorisa néanmoins un sourire. Celui ou celle qui risquait le plus dans ce jeu avec le vent, c'était lui ; elle, elle pouvait s'envoler, même si ses transformations n'étaient pas encore au point.

Elle inspira profondément, rejetant de la buée dans son expiration.

Ils étaient bien ainsi, au faîte du monde.

* * *

- Je connais quelqu’un comme toi.

Battement de cœur.

Un regard concentré.

Absolu.

- Il s’appelle Erwan Narcos.

Erwan Narcos.

Elle grava le nom dans son cœur, et sa tête.

Il existait des gens comme elle.

Elle n'était pas seule ou unique au monde.

- C’est un marchombre.


Clignement des paupières.

Marchombre ou non, elle le trouverait.

Et elle en saurait plus sur elle-même.

* * *

Elle y songea alors qu'ils redescendaient. Son cœur battait vite, avide d'une réponse, d'une aide, d'une compréhension ou d'une explication. Pourquoi certains êtres pouvaient se changer en animaux, et les autres non ? Était-ce là l'explication de son physique pâle, lié à la nature blanche de ses plumes, qu'elle revêtait sous sa forme d'albatros ? Est-ce que cela expliquait son lien avec Cime, qui tournoyait dans les cieux, au-dessus d'eux, insensible à ces pensées purement humaines ?

Et à quoi ressemblait cet Erwan Narcos ? En quel animal se changeait-il ? Est-ce qu'il prendrait mal qu'une apprentie envoleuse cherchât à le joindre pour ce sujet ? Est-ce qu'il lui ferait confiance et répondrait à ses multitudes de questions ou refuserait-il, creusant le fossé entre elle et les marchombres ?

Elle avait bien des interrogations et aucune réponse pour le moment. Elle se promit cependant de chercher à le contacter dès que le cours serait fini et qu'elle serait de nouveau libre pour un petit moment. Elle chérissait cette information que lui avait donné son maître et cela ravivait une flamme de reconnaissance à son égard. Il aurait pu s'en abstenir, étant Envoleur, mais ne l'avait pas fait. Un bref instant, elle se demanda comment ils s'étaient connus, mais ne posa aucune question. S'il ne lui en avait pas dit davantage, c'est qu'il n'estimait pas cela nécessaire.

Les deux jours suivant se ressemblèrent, à traverser un dédale de gorges et de vallées tracées dans la chaîne de montagnes, avant de finir dans une forêt peuplé d'arbres qu'elle ne connaissait pas. Ce fut avec sa curiosité insouciante habituelle qu'elle les admirât.

Ils y progressèrent lentement, sans que cela n'agace Gil, à sa plus grande surprise. Elle ne le connaissait pas franchement pour sa patience. Pourtant, il restait apaisé alors qu'ils se frayaient un chemin, jusqu'à une habitation près de laquelle deux chevaux étaient attachés. Tendue, elle échangea un regard avec Gil qui la calma. Elle n'appréciait guère l'idée de côtoyer d'autres personnes, d'autant plus des inconnus pour elle, mais elle voyait difficilement comment elle pouvait avoir le choix, alors elle ne dit rien. Bien qu'elle se posait des questions sur la santé d'esprit des gens que connaissait Gil, elle voulait se laisser la chance de les connaître sans a-priori.

Les chevaux attachés, ils approchèrent de la porte à laquelle Gil toqua doucement. Cette dernière s'ouvrit sur un homme dont les yeux intensément bleus captivèrent Neige. Il les laissa rentrer, referma la porte derrière eux. Intriguée, l'apprentie promena son regard sur la pièce, et nota la seconde personne. Aussi noir qu’elle était pâle, ils semblaient être les deux faces d'une même pièce qui tournoyait à l'infini. Elle le trouva plutôt beau ; réalisa que ce genre de pensée ne lui avait jamais traversé l'esprit auparavant.

Côtoyer des gens avait fini par la rendre sensible aux autres. C'était probablement une bonne chose, songea-t-elle. D'asociale, elle glissait doucement pour devenir plus ouverte à autrui, tout en conservant une certaine distance ; elle ne pouvait complètement effacer un trait de sa personnalité qu'elle avait gardé durant plusieurs années.

- T’en as mis, du temps, souffla le chauve à l’attention de Gil. Enfin, t’es plus en retard que d’habitude.

- On s’est arrêté un moment près d’une rivière.


Intriguée, le regard de Neige revint à Gil. Cette rencontre était donc prévue depuis longtemps ? Elle laissa tomber son sac, l'imitant.

- Lui c’est Feu-Gris, dit-il en désignant le chauve, et lui c’est son élève, Naol.

- Salut, Neige. Du thé ?


Un brin confuse que l'on s'adressât à elle, notant cependant les noms en passant, elle opina du chef et remercia poliment quand Feu-Gris lui remit une tasse pleine d'un liquide parfumé fumant. Le goûtant, elle en apprécia la saveur, ce qu'elle fit savoir d'un compliment sur la qualité du thé.

Elle écouta avec attention le bavardage du Mentaï, notant intérieurement de faire une blague à Gil sur le fait qu'il parvenait à avoir des amis lorsqu'ils seraient en privé.

- Naol et toi avez à peu près le même niveau, déclara Feu-Gris alors qu’ils partageaient thé et gâteau autour de la table. Giliwyn et moi avons donc eu l’idée de laisser nos routes se croiser un moment et de vous entraîner un peu tous les deux. C’est dans la diversité des exercices et des partenaires que les progrès se font. Encore un peu de thé, Neige ?

Neige opina, tendant sa tasse et intégrant les informations. Elle glissa un regard vers Naol. Quel genre d’exercices allaient-ils effectuer ? Elle ne pouvait nier qu'elle était un brin curieuse.

- Qu'allons-nous faire ? interrogea-t-elle, s'adressant tant à Feu-Gris qu'à Gil.


[Je vais essayer Razz]
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Giliwyn SangreLune
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeLun 06 Juil 2020, 12:52

- Comme d’habitude : observer, écouter, réaliser, apprendre.
- Et comprendre.
- Ouais, ça aussi.


Feu-Gris pencha la tête sur le côté, une malice dans le regard.

- Mais à court terme, vous allez simplement sortir chasser. De votre adresse dépendra notre dîner de ce soir.

Naol repoussa sa chaise, enfila une cape légère et sortit aussitôt, sans accorder un regard à Neige ni même l’attendre. Profitant de ce que Feu-Gris sortait pour le rejoindre, Gil intercepta Neige en refermant doucement, mais fermement les doigts sur son poignet.

- Sois prudente.

Il ne daigna pas expliciter son avertissement et la laissa s’en aller. Dehors, Feu-Gris avait pris une hache pour couper du bois, mais à sa façon de la tenir, Gil devina que quelque chose n’allait pas. Sans un mot, il attrapa l’outil des mains de son confrère, la reposa le temps d’ôter son tabard, puis cracha dans ses paumes et se mit à l’ouvrage avec une puissance doublée d’efficacité. Il n’avait pas fendu de bûches depuis un moment, mais certaines choses ne s’oubliaient pas.

- Que t’est-il arrivé ? demanda-t-il, sans ralentir sa cadence.
- Une mauvaise chute, marmonna Feu-Gris en pressant son bras contre son ventre.

Gil hocha la tête. De même que Neige avec lui quelques minutes plus tôt, il se contenta de cette information sans chercher à en savoir davantage - tout en sachant que davantage il y avait pourtant.

- Tu m’avais dit former une fillette, mais je ne m’attendais pas à ce qu’elle soit si petite…
- C’est pas une fillette.


Lui-même surpris par sa propre véhémence, Gil s’interrompit le temps d’essuyer la sueur de son front.

- Tu verras bien. Et Naol ?
- Il progresse bien, mais c’est une vraie tête de mule.
- Dans ce domaine-là, je parie mon cheval que Neige le bat.
- Vraiment ? Est-ce que ce n’est pas parce que c’est toi qui l’entraînes ?


Mouché, Gil grommella quelque chose, et frappa ses bûches de plus belle. Afin de ne pas être en reste, Feu-Gris soigna les chevaux puis les nourrit ; lorsqu’il rentra dans la cabane, un stock de bûchettes était entreposé dans un coin de la pièce, prêtes à l’emploi. Resté dehors, Gil se rafraîchissait à l’eau froide d’une grande bassine. Il rejeta ses cheveux mouillés en arrière et enfila son tabard sans passer par la case chemise. Le fond de l’air était frais, mais pas assez pour qu’il s’embarrasse d’une couche de tissu. Il se demandait comment Neige s’en sortait. Il ne doutait pas de ses capacités et c’était avec franchise qu’il avait détrompé Feu-Gris, mais, comme toujours depuis que son chemin et le sien s’étaient retrouvés liés, il ne pouvait pas s’empêcher de l’avoir dans un coin de ses pensées.

En outre, il connaissait cette forêt pour l’avoir déjà traversée par deux fois. Etrange, elle ne ressemblait en rien à celles qui recouvraient Gwendalavir, et les créatures que l’on pouvait y croiser n’étaient pas faciles à affronter. Gil soupira. Comme il balayait la petite clairière du regard, ses yeux vairons tombèrent sur Cime et il haussa un sourcil ; pourquoi l’oiseau n’avait-il pas suivi Neige ? Hésitant, il fit un pas dans sa direction, mais l’albatros prit son envol pour se percher sur le toit de la cabane. Incapable de lire son comportement, Gil haussa les épaules. Mais, tout comme l’animal, il décida d’attendre le retour de son élève à l’extérieur : il s’assit sur une vieille souche et parut s’absorber dans le nettoyage de l’une de ses lames.

La nuit était tombée depuis une demi-heure lorsqu’une brindille craqua sous une semelle, annonçant le retour des deux chasseurs.
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MessageSujet: Re: Groupe Aljuin - cours 2   Groupe Aljuin - cours 2 - Page 2 Icon_minitimeMar 07 Juil 2020, 16:48

[quote="Giliwyn SangreLune"]- Comme d’habitude : observer, écouter, réaliser, apprendre.
- Et comprendre.
- Ouais, ça aussi.


Neige roula des yeux. Des propos abscons comme il le fallait. De la part de Gil, cela ne l'étonnait pas, mais il semblait que tous les maîtres versaient dans l'art de parler pour dire des choses obscures. Elle se reprit néanmoins. Il y avait des projets derrière les mots et elle ne pouvait l'ignorer. Une leçon croisée serait sûrement intéressante, même si Naol semblait aussi obtus et silencieux qu'elle. Il était vrai qu'elle n'avait pas vraiment salué le duo, prise au dépourvu.

Feu-Gris poursuivait néanmoins.

- Mais à court terme, vous allez simplement sortir chasser. De votre adresse dépendra notre dîner de ce soir.

Une mise en concours de leurs capacités, seul à seule dès le départ ? Mais avant qu'elle n'eut le temps de dire un mot à l'autre apprenti, celui-ci s'était déjà levé et sortait. Elle retint un soupir. Quelqu'un d'aussi peu prolixe qu'elle n'allait pas être aisé à aborder. Elle se leva à son tour tandis que la porte se refermait sur Feu-Gris. Elle n'avait pas enlevé sa veste en entrant, contrairement à Naol qui avait dû s'habiller. Elle s'apprêta donc à le rejoindre, saisissant arc et carquois.

Gil l'arrêta cependant dans son élan.

- Sois prudente.

- Comme toi, tu veux dire ? le charria-t-elle.

Elle prit néanmoins son avertissement au sérieux et hocha la tête pour le lui faire savoir. Se dégageant doucement, elle rejoignit Naol à la lisière de la forêt et s'y enfonça à ses côtés, malgré qu'il ne lui jetât aucun regard, une fois de plus. D'un geste, elle signifia à Cime de rester près de la maisonnée. L'albatros cria pour manifester son mécontentement – sa maîtresse, seule avec un inconnu et sans lui ? – mais obéit néanmoins. Neige préférait prouver sa valeur à la chasse sans l'aide de son oiseau.

Les bois les engloutirent, denses, et Neige sortit une flèche du carquois qu'elle avait ajusté à son épaule. Elle n'était pas encore parfaite en chasse, loin de là, mais ne tenait pas à se ridiculiser devant l'autre apprenti.

Glissant le trait le long de l'arc, sans bander, elle jeta un coup d’œil à Naol. Elle était toujours autant étonnée par leur dissemblance. Il était noir comme la nuit, elle était pâle comme la lune. S'efforçant d'avancer sans bruit, glissant sur les feuilles mortes, comme Gil le lui avait appris, elle progressa à ses côtés.

Les arbres se refermaient sur eux, s'éveillant à leurs sens, fourmillant de vie. Des insectes là, une source d'eau paisible ici, parsemée de joncs et de nénuphars... De la mousse tachait les troncs, dont certains s'élevaient jusqu'à cacher le ciel, leurs branches tombantes chargées de feuilles vertes ou marrons, parfois de fruits. Neige s'arrêta un instant pour cueillir des poires à un arbre fruitier, qu'elle chargea à son sac. Son action attira l'attention de Naol, à qui elle lança vertement :

- Y a un problème ?

Il ne répondit pas, haussant les épaules, et Neige imita son geste par mimétisme. Ils continuèrent de progresser, jusqu'à qu'ils se figent tous deux, alertés par des cris d'oiseaux. Devenus ombres silencieuses, ils se glissèrent contre des troncs, passèrent la tête en direction du bruit.

De petits volatiles bruns hauts d'une trentaine de centimètres, grassouillets, s’ébattaient dans l'eau d'un étang. Leur plumage était adapté au couleurs environnantes, et leur comportement semblait indiquer qu'il n'y avait aucun prédateur en vue.

Naol et elle encochèrent une flèche de concert, visant les oiseaux inconscients de leur présence. Ils eurent chacun le temps de tirer deux flèches avant que les volatiles ne s'envolent, effarés, dans un envol bruyant qui, devina Neige, risquait d'attirer l'attention de prédateurs.

Ils récupèrent leurs proies, et d'un geste, la jeune femme indiqua qu'ils devaient partir le plus vite possible. Impossible de savoir quel animal pouvait être attiré par le bruit causé, alors autant s'en aller prestement.

Ils progressaient entre les taillis et les arbres quand le feulement d'un tigre les surprit. Dérapant sur les feuilles mortes, Naol commença à tomber le long d'un glissement de terrain. Lâchant son arc, Neige attrapa vivement sa main, s'accrochant à une branche solide de l'autre.

L'autre apprenti était plus grand, et plus lourd qu'elle, malgré les muscles qu'elle avait pris, et elle sentit vite son corps tiraillé entre son poids et la branche de l'arbre. Cela, et sa main qui commençait à devenir moite, tandis que le tigre semblait s'approcher.

- Grimpe le long de mon bras, intima-t-elle, brisant le silence qui s'était installé entre eux depuis le début.

Obéissant, Naol agrippa fermement son bras et remonta petit à petit, ses pieds s'enfonçant dans le glissement de terrain pour lui permettre de prendre un peu d'élan. Neige grimaçait de douleur mais continua à tenir, jusqu'à que, parvenu à la terre ferme, ils s'écroulent tous deux sur le sol, épuisés. Le feulement du prédateur qui avait continué à s'approcher les firent aussitôt bondirent sur leur pieds. D'un geste vif, Neige récupéra son arc laissé au sol et ils entreprirent de grimper à un arbre proche.

Épuisée par son effort précédant, la jeune femme n'aurait pu parvenir au faîte de l'arbre sans l'aide de l'autre apprenti, qui l'attrapa par la main pour la tirer avec lui. Assis côte à côté, appuyés aux branches, ils regardèrent le tigre tourner autour de l'arbre, feulant de frustration.

- Merci, souffla Neige.

Brève hésitation.

- Merci également.

Ils échangèrent un regard et se sourirent gauchement. Voilà qui était fait, songea Neige. Un mur était tombé entre l'apprenti et elle. Elle ne pouvait que se réjouir de ne plus avoir affaire à une porte de prison.

Ils durent attendre la tombée de la nuit avant que le tigre, lassé, ne décidât de partir à la recherche de proies plus obligeantes. Ils descendirent alors de l'arbre, vérifièrent qu'ils avaient toujours leurs prises avec eux malgré l'affairement du glissement de terrain et de la grimpée à l'arbre, puis se dirigèrent vers la clairière d'où ils venaient, prenant cette fois attention à où ils mettaient les pieds dans la forêt traître.

Arrivés devant l'habitation, ils aperçurent Gil, assis sur une souche. Remarquant qu'il les avait attendu, Neige se préoccupa d'abord de son albatros, qu'elle siffla doucement. L'oiseau se posa près d'elle et elle caressa ses plumes blanches pour se faire pardonner de ne pas l'avoir pris avec elle. Elle se tourna ensuite vers son maître.

- Je pense qu'on aura à manger ce soir, fit-elle tranquillement.
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