#OnVaToutFairePéter (Révolution Part II)

Voïmakas s’attendait à la réponse de Gil, il ne put cependant pas s’empêcher de ressentir une petite pointe de déception quand il passa son tour malgré les railleries de Shailey. Mais c’était son choix, alors le Mentaï n’en fit pas tout un plat.

Son attention s’était déjà reportée sur Syles, qui les entraînait un peu plus loin pour leur présenter…  Un homme très particulier. Un jeune homme plutôt.
Le discours de l’Envoleur le tint coi, ceci dit il fronça les sourcils en échangeant un regard avec sa fille qui avait froncé les sourcils. Syles ne la voyait pas, cependant il n’oubliait pas de s’adresser à elle, et le Mentaï avait la certitude que ça aidait l’Envoleuse à tenir debout.
Elle semblait si perdue, là. Si dangereuse et fragile à la fois…
Était-ce la lueur dans ses yeux ? La moue frustrée tremblante sur le bord de ses lèvres ? Ses poings serrés ? Il n’en était pas certain, mais pour la première fois Voïmakas sentit un frisson d’appréhension traverser sa colonne vertébrale en regardant sa fille.

Oh, Hien lui avait dit que ça lui était déjà arrivé plusieurs fois, parfois suite à des altercations avec Kaünis, parfois juste en l’observant. La femme du Mentaï avait ce sixième - ou huitième sens - et lui avait déjà fait part de ses impressions vis-à-vis de leur fille et de son développement, de son entraînement, de son évolution.
Kaünis était dangereuse.
Pas dans le sens juste redoutable ou puissante, mais elle avait cette aura de chaos primaire et primal qui dansait autour d’elle. Cette énergie s’était épaissie avec le temps et était devenue si sombre et dense que même dans la vie de tous les jours elle filtrait.
Cependant, le Mentaï n’en avait jamais fait l’expérience à ce point.

Était-ce parce qu’elle le protégeait ? Parce qu’elle tenait tellement à lui qu’elle contenait tout ça quand il n’était pas loin ?
Ses questions restaient en suspens, parce que l’énergie qui émanait de l’Envoleuse pulsait en puissantes vagues obscures autour d’elle.

Ce fut la voix de Syles qui le ramena à la réalité.
- Voïmakas, je me dis que tu es sûrement celui qui a le plus de chances de savoir alors… T'as une idée pourquoi il a le même genre de symboles que ta fille..?
Il fallut plusieurs secondes au Mentaï pour reconnecter ses neurones et comprendre de quoi parlait l’Envoleur. Son regard se posa sur le torse du nouveau venu, et ses sourcils se froncèrent.

- Mmmm…

Kaünis s’approcha de Garret, qui eut un mouvement de recul magré lui.
Elle avait les sourcils froncés, et tendit les doigts vers les arabesques sur le torse du jeune homme aux cheveux blancs. Quand sa peau toucha celle de l’apprenti non officiel de Syles, elle sentit un frisson remonter le long de son torse mais n’y prêta aucune attention.

Ses doigts suivaient une courbe particulière, celle de cette arabesque sinueuse mais fluide, qui serpentait le long des autres sans jamais les toucher ou s’enrouler autour.

- C’est un faux.
Voïmakas fronça les sourcils et échangea un regard avec Rybris. Hein ?
- C’est un faux. Cette courbe n’existe pas et voudrait dire que toutes les autres n’ont pas d’importance. Alors à moins que ça ne soit un messa… Elle s’interrompit brusquement, pencha vivement la tête sur le côté et fronça les sourcils.
- Une seconde. Ça va piquer. Et sans plus de manière elle poussa un peu de sa greffe sur le torse du jeune homme, qui fut pris d’un violent frisson et eut le réflexe de se jeter en arrière.
Les doigts en suspens dans l’air, les sourcils froncés, elle se mordit la langue.
- Ça fait combien de temps que tu as ce tatouage ? Tu te souviens de quand tu l’as fait ?

Les deux Mentaïs échangèrent un autre regard.
Voïmakas n’était pas surpris que Kaünis connaisse la signification de certaines de ces courbes, après tout elle avait toujours feuilleté les volumes de la maison quand elle était plus jeune, et le fait qu’elle se soit faite tatouer certaines de ces courbes avant même de rallier le Domaine démontrait qu’elle les comprenait au moins suffisamment.

S’ébrouant un instant, Voïmakas posa son regard sur Syles, qui n’avait pas entendu Kaünis.
- Je ne sais pas. Mais Kaünis vient de dire que c’était un faux, il y a une courbe qui éliminerait toutes les autres. Et elle a demandé à Garret depuis combien de temps il avait le tatouage et s’il se souvenait de quand il l’a fait faire.
Il avait dit la dernière phrase en plongeant son regard dans celui du jeune homme aux cheveux blancs pour l’inciter à parler.

Kaünis était restée immobile, les yeux dans le vague.

Dire que Garret était méfiant aurait été grandement sous estimé sa méfiance, justement. Il ne connaissait pas son ''maître'' depuis longtemps, mais celui-ci lui avait fait risquer sa vie au moins trois fois par jour tout les jours et ça, c'était pendant les vacances..!

De plus, il ne pouvait pas vraiment répondre à la question de la jeune femme, c'était un peu comme demander à quelqu'un ce qu'il avait manger. Pendant toute sa vie. Se disant qu'il était absolument impossible de tout dire, il commença donc par le commencement.

J'ai... Commencer ça un jour d'hivers il y as près de quinze ans... Le dessin, j'veux dire, je l'ais fait appliquer ensuite, puis j'y ais rajouté au fil des ans, je sais pas ce que c'est.

Les courbes, les formes, tout ça, ça me viens en me réveillant, comme une évidence qui as été forcée dans mon crâne... Et les maux de têtes n'arrêtes pas avant que j'ai rajouter ce que j'ai en tête, courbe après courbe, rune après rune.

Le tatoueur du casino est habitué, ça fait des années, même avant que je n'en récupère les clefs, que j'y vais pour faire rajouter tel ou tel détail, plus simple, il ne pose pas de questions auxquels je n'ais pas les réponses.

Tout ce que je sais c'est que c'est toujours la même chose.

Je dors, puis je rêve d'un champ enneigé, j'y suis même pas, dans ce champ, il est vide, généralement, puis quand je m'éveille, j'ai un ajout en tê--

Pardon..?

Garret se tendit en se tournant légèrement vers son maître. Quand celui-ci demandait de répéter, ce n'était que rarement de bonne augure.

Euh... Je rêve d'un champ de neige puis je me réveille avec--

Générallement.

Certains regards croisèrent Syles comme s'il devenait fou, celui-ci soupira et plaça donc des mots sur sa pensée.

Tu as dis que le champ était GÉNÉRALEMENT vide, cela laisse entendre qu'il ne l'est pas toujours, alors que diable y as-t-il dedans, quand il n'est pas vide..?

L'apprenti resta interdit un moment, c'était si important, ce genre de détail stupide? Au regard des autres, cela dit, il n'osa pas émettre d'objection.

Un homme... Ou une femme, je suis pas sûr, juste c'est quelqu'un qui porte une cape de voyage comme on voit parfois dans le nord, j'ai vu un frontalier en utiliser une, une fois, vous savez, le modèle blanc et bleu, qui as une capuche avec un masque pour couvrir le nez et la bouche contre la neige..? Bref, quelqu'un qui porte une cape de ce genre, qui marche dans cette tempête, et des épées, beaucoup d'épées, plantés dans le sol.

La personne s'approche d'une des épées, la touche, s'agenouille près puis va pour retirer son masque et se tourne vers moi avec un regard réprobateur. Je me réveille toujours à ce moment là précisément.

J'en sais pas plus, mais c'est un faux quoi au juste? Et qu'est-ce que ça change, quand je les ais fais, exactement..?

Le jeune homme explosait de questionnements et pourtant, Syles restait silencieux, en pensés, ainsi que Rybris et la nana qui ressemblait à l'envoleur, qui étaient les plus proches de lui.

Quand il tourna son regard vers la fille aux yeux verts, que son maître semblait carrément ne pas voir par moments vu comment il semblait la chercher avant de faire la moue, pour poser ses questions, cela dit, ce fut l'homme en question qui parla le premier.

Ce genre de cape n'est utiliser que dans le nord, et encore, par une poignée de frontaliers qui vont dans les endroits les plus froids de tout l'empire.

Un frontalier alors? S'enquit Rybris Ou quelqu'un qui en connais un Complêta son fils Après tout, c'est pas comme si c'était un grand secret, même si on ne s'en sers que rarement.

Rybris tentait de penser à ce que ça pouvait vouloir dire, Syles, lui, observa les alentours, agacé, puis frappa du pied trois fois et observa le sol... Voyant apparaître un peu de Gel, il sourit malgré lui. Celui qui l'empêcherait de parler à Kaünis n'était pas née..!

Il tourna son regard vers la hauteur approximative des yeux de la jeune femme dans cette direction puis reprit la parole.

On as beau avoir deux mentaïs ici, suis sûr que même eux n'auraient pas reconnus un faux si rapidement, alors toi, tu en pense quoi, de ces rêves..?

Tu crois que c'est une message? Je comprends pas trop en quoi ça en serait un, comment ça fonctionnerait ni ce que ça voudrait dire mais...

...Et bien si c'est un faux, alors ça doit être que quelque chose, dans ces courbes, ne fait pas de sens, c'est ça? Et si un truc fait pas de sens, c'est stupide de le rajouter au tatouage, sauf si c'est un code, auquel cas là, ça fait tout le sens du monde, puisqu'il faut une clef, pour ce code.

Et quelqu'un qui ne connaît pas TRÈS bien ce genre de courbes n'y comprendrait jamais rien, ne remarquerait pas la courbe en trop ou la rune mal écrite, donc...

...Un code... T'en pense quoi?

Il observait le vide.

Pourtant, il sentit presque le regard de Kaünis, dans le sien.

Elle était là, c'était une certitude et c'était ça l'important.

Mais plus que tout, il voulait la retrouver, fêter ça, ensuite, il avait quelques choses et des plans à mettre en marche mais...

...Il se promit à ce moment là qu'une fois prêt, une fois qu'il se sentirait enfin capable, il lui demanderait de l'accompagner.
L'envoleur avait une envie folle de partir sans rien dire aux autres, dans le nord, de se vider de civilization, il n'avait toujours pas retrouver vraiment le goût des villes, qu'il n'avait déjà pas beaucoup. Et puis des vacances accompagnés de Kaünis, seuls dans un nord frigorifique, lui semblait fort intéressantes. Après tout, il faudrait rester au chaud!

Se sortant de ces pensées, il enchaîna sur une autre, dont il était sûr tirerait un regard courroucé de Kaünis à l'encontre de certaines personnes... Principalement le père de celle-ci, se dit-il.

Voïmakas...

L'homme se tourna vers lui. En moins d'un instant son expression changea. Il sentait déjà que Syles allait lui demander quelque chose qu'il n'aimerait pas, le frontalier en était certain. Ils avaient appris à se connaître assez pour ça, même s'ils étaient loin du niveau de compréhension entre Gil, Kaünis et lui, qui se passait complètement de mots ou presque.

...Il y as un moment, nous avons fait un marché.

Quand je suis revenu de ces deux ans, je t'ais promis de l'aide, une faveur pour une faveur.

J'ai alors rempli ma part du marché.

Aujourd'hui, je m'apprête à te demander de respecter notre entente.

Tel que discuté ce jour là, je te demande d'accepter de me faire face en duel, et bien que celui-ci soit amical je vais être clair : On ne retient rien, ni l'un ni l'autre ne fait de cadeaux à l'autre...

...Comme il y as plus pressant, je dirais un peu plus tard.

Une semaine, pour régler nos problèmes du moment et préparer la baston, ça te va..?

Son regard enflammé fixait le mentaï dans les yeux. Celui-ci ne semblait pas très content de se faire ainsi rappeler cette promesse que Kaünis n'avait pas vraiment appréciée, mais après un petit moment à peine d'hésitation, il hocha doucement la tête.

Malgré le regard incrédule de Shailey, qui savait à quel point il était difficile de faire accepter ce genre de demande au mentaï.

Malgré le cris de Rybris.

Malgré Kaünis.

Une promesse était une promesse.

Voïmakas était beaucoup de choses, peut d'elles honorables, mais il était encore, à sa façon bien spéciale, un homme d'honneur.

Et une promesse était une promesse.

Un marché était un marché.


T'ES PAS UN PEU MALADE!?

Rybris observa Syles soupirer, une fois que Voïmakas eu hoché la tête, puis se tourner vers lui, lentement.

Un combat avec Voï n'est pas une blague bon sang! Surtout un truc sérieux! Même s'il retenait ses coups juste un peu, tu pourrais crever!

Le jeune homme haussa un sourcil.

Bien pour ça que j'lui demande, toi, tu te retiens tellement, quand on se pratiquent, que j'ai plus de difficulté à tenir contre Gil ou Kaünis...

...Pourtant, on me dis que t'es considéré l'égal, ou du moins très proche, de Voï. Donc selon ce que tu viens de dire, tu devrais m'écraser comme une vulgaire mouche.

Nous nous battons contre les célestes, j'suis d'accord, mais moi, mon but, c'est le mec qui m'as capturer, les autres, rien à battre, et s'il est bien un mentaï fréquentant les mêmes cercles que Voïmakas... Alors il doit être particulièrement puissant.

J'ai sa promesse d'une séance, mais pour être franc, je compte bien tenté de le convaincre, même si ce serait sans doute difficile, de m'en accorder quelques autres, même peut-être de me fournir un ou deux conseils.

Je ne m'intéresse pas à l'imagination, et dès que je vais en être débarrasser, je serais bien content.

Mais mes adversaires s'en servent, eux. Et plus j'ai d'expérience contre quelqu'un de puissant et élevé dans les spires, mieux ce seras.

Comme tu retiens tes coups et que je suis incertain de ton niveau, je demande à Voï, voilà tout.

Le mentaï siffla entre ses dents de frustration devant la tête de mule de son fils, puis se détourna pour aller faire un tour.

Bien sûr, qu'il retenait ses coups, bien sûr, qu'il ne voulait pas le blesser.

Et puis, surtout, il sentit le regard de Voïmakas, dans son dos, le seul homme autre que lui même qui connaissait son secret.

Rybris était un circuit disjoncté, un conduit troué.

Il préférait ne pas se servir de l'imagination non pas parce qu'il ne pouvait pas faire quelque chose d'impressionnant... Mais bien parce qu'il avait tendance à... Perdre le contrôle.

Oh les petits dessins ne posaient pas de risque, et quand il perdait le contrôle, il y avait généralement un second mentaï dans le coin, assez puissant pour contrôler les dégâts ou à peut prêt, c'était pour ça qu'il ne se faisait donner que des missions d'équipe par le domaine.

Mais parfois, il perdait le contrôle brièvement, comme ce fameux jour où, fatigué et frustré, il avait eu un débat avec Voï.

Le débat en question n'avait pris fin que lorsqu'une objection de sa part avait été accompagnée d'un éclair qui l'avait frappé sans lui faire mal, mais en perçant un trou dans le plafond, explosant une table, soufflant et brûlant plusieurs papiers importants et surprenant autant lui même que Voïmakas.

Il était une bombe à retardement et il le savait.

Mais surtout, il se refusait ''d'exploser'' quand son fils n'était pas loin.

Il lui avait fait bien assez de mal sans le vouloir par le passé.

Plus jamais.


Le jeune homme aiguisait ses lames lentement, ce qui l'aidait à penser. Il tentait de se concentrer sur le tatouage de Garret, se sortir le fait qu'il ne voyait pas Kaünis de la tête, sinon, il en était sûr, il allait exploser.

La dernière fois qu'il avait explosé, ça avait créé Lynx, donc pas forcément la meilleure idée, d'atteindre ce niveau de frustration, ou pire, encore une fois.

Il entendu néanmoins, malgré sa concentration, les pas approchants à sa droite et leva légèrement la tête pour voir de qui il pouvait bien s'agir...