- Toi ! Je t’ai vu !Raph poussa un soupir en entendant la voix de Xoah. Mais que faisait-elle ici, à Al-Chen ? Elle était censée être encore dans la C apitale. A moins qu’elle ne le cherchât, tout simplement, ce qui aurait expliqué cela : sa présence.
Et cela avait le don de l’irriter.
Les doigts de la demoiselle dont il était en train d’apprendre le nom se resserrèrent autour de son bras, et il se mordit l’intérieur de la joue. Et voilà, il venait de perdre l’occasion de se changer les idées. Cela faisait quelques semaines déjà qu’il était arrivé à l’Académie, mais aucun nouveau groupe ne s’était encore formé, et il avait du temps libre. Il avait finalement décidé de sortir de cet endroit pour retourner à Al-Chen, faire quelques achats et nouvelles connaissances, au passage… Tant qu’à faire.
- Raph, ne fais pas la sourde oreille !Poussant un soupir, le Marchombre finit par se tourner vers la source de la voix. Xoah semblait furieuse, et il ne l’était pas moins qu’elle.
- Pis c’est qui… Ca ?
- Désolé pour le désagrément, jeune demoiselle, mais je pense qu’il serait plus sage que vous disparaissiez…Il sentit le regard de la jeune fille sur lui, ainsi que sa déception. Il ne comprenait pas trop, d’ailleurs, mais peu importait : elle comprit très rapidement qu’il valait mieux qu’elle file, tout simplement. La colère de Xoah était palpable.
- Qu’est-ce que tu fous là au juste hein ? Siffla-t-il entre ses dents en reportant son attention sur cette dernière. Cela sembla la prendre au dépourvu, mais il sentit précisément une bouffée de rage émaner de sa meilleure amie.
- Ce que je fais là ?! Ca fait six mois que l’on n’a plus de nouvelles de toi, tu te fous de moi ?
- Et tu crois que c’est pourquoi que je ne donne pas de nouvelles ? dit-il en la sentant croiser les bras sur sa poitrine.
- Oh, tu cours après les conquêtes. Tu sais que celle-là était un thon ?Là, c’en était trop.
- Tu n’es pas ma mère, et même si c’était le cas, en aucun cas tu as le droit de décider de ce que je veux faire de ma vie ! C’est pour ça que vous n’avez plus de nouvelles : je suis libre bon sang. J’en ai assez que vous m’arrachiez les plumes !Et avant que Xoah n’eût pu répliquer, Raph se fendit dans un bond prodigieux, agrippa une barre de métal, fit un tour autour avant de s’élancer sur un toit et de disparaître. Tout ça en moins de deux secondes.
Comme à chaque fois, Xoah se demanda s’il était vraiment aveugle… Avant de se souvenir du visage de ce thon, justement.
Serrant les poings, elle bouillait intérieurement.
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Se passant la main sur le visage, Raph gratta sa barbe d’un jour du bout de ses ongles, et le crissement familier lui permit de prendre une grande inspiration.
Xoah avait dû employer les grands moyens pour le retrouver, car il ne s’était pas pointé en ville depuis plus de trois heures. Et il détestait être pris en filature ainsi. Elle le savait pourtant, mais elle lui courait toujours après comme s’il lui appartenait, et cela avait le don de l’agacer au plus haut point.
Escaladant l’enceinte en pierre de la ville, il se laissa glisser de l’autre côté. Quand ses pieds touchèrent le sol, il poussa un petit soupir de soulagement, et s’éloigna d’Al-Chen, longeant le lac.
Il entendait les légères vagues venir s’écraser sur le sable, qui crissait doucement sous leurs assauts répétés, ainsi que sous ses propres pieds. Le vent venait jouer à la surface de l’eau, et s’engouffrer dans les feuilles des arbres alentours. S’arrêtant brusquement, le Marchombre poussa un nouveau soupir, avant de s’affaler sur le sable pour s’asseoir, le menton sur les genoux.
Il entendit très clairement quelqu’un approcher, mais ne bougea pas.